Lunch avec Counterfeit Kunkoo
Entretien avec Reema Sengupta, réalisatrice de Counterfeit Kunkoo
Comment avez-vous pris la décision d’écrire Counterfeit Kunkoo ?
J’avais écrit le script de Counterfeit Kunkoo il y a quelques années quand ma mère a dû affronter la discrimination au logement alors qu’elle voulait louer une maison. En février 2017, j’ai décidé de faire ce court métrage parce que je pensais que c’était une histoire qu’il fallait raconter au plus vite. J’ai travaillé sur des projets publicitaires pendant trois ans, et j’avais vraiment besoin d’un projet plus passionnel pour me reconnecter aux raisons qui m’ont fait devenir réalisatrice.
Avez-vous écrit Counterfeit Kunkoo comme un tout ou est-il partie d’une plus grande histoire ?
Je l’ai écrit comme un court métrage. Quand j’ai repris l’an dernier, j’ai réécrit certaines parties que je trouvais alors un peu naïves.
Comment avez-vous trouvé l’inspiration pour ce mari violent et repoussant ?
J’ai eu le déplaisir malheureux de connaître de tels hommes misogynes qui ont traité leurs femmes comme des esclaves-porteuses d’enfant. Ils sont partout autour de nous – des pères, des oncles, des connaissances. J’aimerais que le personnage du mari ne soit qu’une ombre surgie d’un recoin sombre de mon esprit, mais c’est une réalité omniprésente de la société Indienne.
À quel point est-ce compliqué pour une femme seule de vivre en Inde ? Est-ce aussi compliqué d’acheter une voiture ou juste un billet de train ?
L’approche et le regard que la société a sur une personne change au moment où la femme est séparée ou divorcée. J’ai connu tant de femmes qui ont choisi de rester près d’un mari abusif plutôt que d’affronter le préjudice qui les attendait après la séparation. C’est une triste réalité. Cependant, la discrimination au logement n’arrive pas qu’aux femmes. J’ai vu des personnes être discriminées pour leur religion, leur caste, leur profession et même leurs préférences culinaires. Heureusement, cela n’envahit pas le quotidien pour acheter une voiture ou un billet de train. Inutile de rappeler que la discrimination est le plus souvent inconsciente et toujours illégale.
À quel point êtes-vous intéressée par la question de construire sa propre destinée et pensez-vous réaliser d’autres films autour de ce thème ?
Je suis très intéressée par la question de construire sa propre destinée – et de bénéficier de la chance de pouvoir développer sa propre identité indépendante. En tant que société, nous sommes écrasés par des siècles d’oppression fondée sur le genre. Ce n’est que très récemment que de jeunes réalisatrices commencent à être reconnues et que l’on voit plus de personnages féminins. Plus nous parlons de ces choses-là, plus nous poussons la création cinématographique à inciter à l’empathie et à faire évoluer les regards, et plus tôt nous pourrons espérer un monde où nous n’aurons plus besoin d’en parler.
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées en particulier ?
Absolument. Avec les courts métrages, en particulier quand vous auto-financez, vous profitez d’un féroce sentiment de liberté créative. Vous pouvez vraiment vous laisser aller à trouver votre voie, au lieu de vous inquiéter de la valeur marchande et des retours financiers. Tout le monde comprend que les courts métrages sont tout au coeur du tumulte et qu’ils auront plus de visibilité si on les aide et si on les soutient.
Si vous êtes déjà venue, racontez-nous une anecdote vécue au Festival de Clermont-Ferrand ?
Sinon, qu’en attendez-vous ?
Je suis tellement contente que notre Première Européenne soit au plus grand et au plus prestigieux festival de court métrage au monde. Nous sommes aussi très fiers d’être les seuls à représenter l’Inde. Je m’attends à rencontrer de passionnants réalisateurs du monde entier et espère commencer des relations créatives qui vont façonner la génération à venir de réalisateurs.
Où voir le film après le festival ?
Le film va continuer son voyage en festivals pendant un an ou deux et sera aussi disponible sur Internet.
Pour voir Counterfeit Kunkoo, rendez-vous aux séances de la compétition internationale I12.