Breakfast avec God Dress You (Dieu vous habille)
Entretien avec Mattia Epifani, réalisateur de God Dress You (Dieu vous habille)
D’où est venue l’idée de God Dress You ?
J’ai lu beaucoup d’articles sur un jeune prêtre orthodoxe qui avait été sanctionné par son patriarche pour avoir posté des vêtements et des accessoires de haute couture sur sa page Instagram. C’est ce qui m’a poussé à écrire God Dress You : une parabole contemporaine sur la modernité et sur la façon dont la technologie et les réseaux sociaux peuvent transformer nos vies et influencer notre intimité.
Pouvez-vous nous retracer la genèse de votre film, de l’écriture du scénario au tournage ?
Avant de me lancer dans la phase d’écriture, j’ai effectué des recherches approfondies sur la vie monastique orthodoxe et la routine des moins orthodoxes. Le scénario, écrit en collaboration avec Francesco Lefons, est basé sur une opposition entre deux dimensions narratives : la vie privée de Pater Athanasius et la vie collective du monastère. La première dimension est élaborée autour d’un style de vidéo-selfie, réalisée par le personnage principal – sa voix sert d’ailleurs de voix-off tout au long du film. La deuxième dimension, collective, utilise le style du documentaire et des moyens d’expression qui mettent en valeur l’austérité et la rigueur de l’univers monastique. Le contraste entre ce qui est public et ce qui est caché est la clé qui nous a servi à rendre cette parabole universelle. En ce qui concerne le lieu de tournage, la structure du scénario imposait que l’on tourne dans un vrai monastère, avec la participation de vrais moines orthodoxes. Le seul élément de fiction est l’acteur principal. Après une longue phase de recherche, les moines du monastère Panaghia Proussiotissas ont accepté de participer à notre projet de court métrage.
Aviez-vous des images et des acteurs en tête en écrivant le film ?
Au départ, le personnage de Pater Athanasius devait être un moine novice. Mais j’ai ensuite rencontré Panagiotis Samsarelos, acteur et vidéaste, et c’est lui que nous avons choisi pour incarner le protagoniste. Il a donc fallu adapter les caractéristiques physiques et humaines du personnage pour qu’elles collent parfaitement à celles de Samsarelos. Dès le début, il s’est lancé corps et âme dans ce projet, et après une période de préparation en Italie, il s’est rendu en Grèce. Il a passé plusieurs semaines au monastère de Panaghia Proussiotissas, avec les moines qui allaient apparaître dans le film. Je pense que cette approche était la meilleure pour traduire l’intimité de cette histoire vraie.
Comment aimeriez-vous que le public réagisse à votre film ?
J’espère que toute personne qui verra mon court métrage s’y retrouvera d’une façon ou d’une autre. J’espère qu’on y reconnaîtra une métaphore sur notre époque, et sur la technologie et sa tendance à bouleverser les limites entre le privé et le public, entre le sacré et le profane.
Quel est l’avenir du format court métrage d’après vous ?
On considère souvent le court métrage comme le « format des jeunes réalisateurs » : grâce au court métrage, ils peuvent apprendre le métier – c’est un espace où les jeunes cinéastes peuvent poser les jalons de leur propre style, en attendant l’occasion de réaliser un long. Mais aujourd’hui, le potentiel du court métrage n’est pas apprécié à sa juste valeur. Les jeunes réalisateurs, soit par manque d’inspiration, soit par manque de courage, ont tendance à adopter des styles et des outils narratifs qui ne les représentent pas, produisant en série des courts métrages qui se ressemblent tous plus ou moins. Je pense sincèrement que les festivals ont un grand rôle à jouer en la matière, en mettant en avant les projets qui montrent véritablement le courage et le travail des réalisateurs. J’aimerais que le court métrage devienne un espace où les jeunes cinéastes puissent exprimer leur talent et leur point de vue, en se forgeant un style personnel qui représente notre génération auprès de celles qui viennent après nous.
Pour voir God Dress You (Dieu vous habille), rendez-vous aux séances de la compétition internationale I7.