Goûter avec Nuit debout
Interview de Jean-Charles Paugam, réalisateur de Nuit debout
Comment avez-vous eu l’inspiration pour le personnage de Franck ? Avez-vous connu une personne qui a vécu cette situation ?
Le personnage de Franck m’a surtout été inspiré par mon acteur principal, Pierre Lottin : son énergie, son physique, sa diction, etc. Je ne considère pas que Franck vive une « situation » particulière. Certes, il est à la dèche, mais à 25 ans, qui ne l’est pas de nos jours ? Ce n’est pas un marginal qui finira dans la rue, mais un petit « branleur » qui préfère se la couler douce et squatter chez ses potes plutôt que de rentrer dans le système.
Qu’est-ce qui vous intéressait dans le fait de le faire errer à Nuit Debout ?
J’ai eu l’idée de Nuit debout après avoir vu Adieu Philippine de Jacques Rozier. Nous étions alors au plus fort du mouvement. Je me suis soudain dit que, si les réalisateurs de la Nouvelle Vague étaient encore en vie (y compris Godard), ils sauteraient sur l’occasion pour aller faire un film là-bas avec une poignée d’acteurs et leur caméra. Comme chez Rozier dans Adieu Philippine, j’ai volontairement laissé le contexte politique en arrière-plan pour me concentrer sur une « petite histoire », celle de ce jeune homme de notre époque qui doit à tout prix « choper une meuf » s’il ne veut pas se retrouver à la rue pour la nuit.
Pouvez-vous nous dire quelques mots de Benoît Hamon, et du rapport au contexte de Nuit Debout vis-à-vis de son homonyme ?
Je ne comprends pas vraiment votre question… Je n’ai bien évidemment pas choisi Benoît Hamon (l’acteur) pour son nom, mais pour son talent : je l’avais vu dans un autre court métrage, Jeunesse des loups garous de Yann Delattre, où je l’avais trouvé excellent. Mais il est vrai que son nom n’est pas sans ironie pour un film sur Nuit debout !
Comment avez-vous choisi Pierre Lottin, le comédien principal, et les autres acteurs ?
Avec Pierre, Nuit debout est notre seconde collaboration après mon précédent court métrage, Cadence, produit également par Triade Films. J’ai découvert Pierre dans l’un de ses premiers films, Johnny, un court métrage de Bruno Ballouard. Son jeu, sa prestance, son énergie m’ont aussitôt impressionné. Pierre est un acteur instinctif, physique, presque animal, ce qui me semble être plutôt rare parmi les comédiens français. J’ai pensé, écrit, réalisé ce film pour lui, pour qu’il puisse donner libre court à son incroyable talent.
Enfin, comment avez-vous procédé au tournage sur la place de la République, était-ce réellement tourné pendant Nuit Debout ou avez-vous tourné après la période d’implication populaire ?
Nous avons tourné fin avril 2016, alors que le mouvement commençait quelque peu à s’essouffler, mais était encore bel et bien vivace. Au départ, nous avions envisagé de tourner à l’iPhone afin d’être le plus discret possible, mais finalement, nous nous sommes rendus compte qu’étant donné le nombre de caméras d’ores et déjà présentes sur la place de la République, nous pouvions réaliser sans problème une fiction « incognito ».
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées en particulier ?
Pour pouvoir tourner un film en pleine Nuit debout, nous avons dû aller extrêmement vite (de l’écriture au tournage, nous avons mis environ trois semaines), puisque nous ne savions pas jusqu’à quand le mouvement allait durer. Seul le format du court métrage nous permettait une telle rapidité. Fort de cette expérience, nous nous apprêtons cependant avec mon producteur, Martin Berléand, à tourner un long métrage dans le même esprit que Nuit debout avec le même personnage principal, toujours incarné par Pierre Lottin.
Pour voir Nuit debout, rendez-vous aux séances de la compétition nationale F6.