Dîner avec Son of Sodom
Entretien avec Theo Montoya, réalisateur de Son of Sodom
Comment avez-vous rencontré Camilo Najar ?
J’ai rencontré Camilo il y a 6 ans lors d’une fête. Quand je l’ai vu, il a immédiatement attiré mon attention, c’était un type vraiment spécial, avec ses cheveux bouclés, et super mince. Et puis, il avait une personnalité irrésistible. Je me souviendrai toujours d’une phrase qu’il m’a dite : « Je me soucie plus d’avoir de l’acné que d’être gay ».
Parlez-vous souvent des questions touchant les personnes gaies, lesbiennes, bisexuelles et transgenres dans vos films et allez-vous le faire de nouveau à l’avenir ?
Je pense que je fais le portrait de ma génération et cette génération explore sa sexualité. J’essaie de ne pas trop prêter attention à l’orientation sexuelle de mes amis, j’essaie de voir des êtres humains. Mais j’ai conscience que dans une société aussi conservatrice, une société qui nous a élevés avec des modèles hétéronormatifs, décider d’être différent, d’être soi-même, d’être libre, entraîne des conséquences, souvent négatives. Et oui, dans mon prochain projet, je vais explorer à nouveau ma génération (mes amis) à Medellín, la ville où j’ai grandi. J’aimerais réussir à montrer le contraste d’une jeunesse queer évoluant en plein cœur d’une société religieuse et conservatrice.
Aviez-vous prévu de vous concentrer sur la question de la toxicomanie quand vous avez envisagé de faire un film sur sa vie, et pourquoi ?
Je ne pense pas que mon film traite de la toxicomanie car Camilo n’était pas toxicomane. Il prenait des drogues, comme moi et beaucoup d’autres dans le monde. Je pense que mon film parle davantage d’un sentiment de découragement, un désespoir que les jeunes ressentent quant à leur avenir, et du fait de vivre comme s’il n’y avait pas de lendemain. Et y en a-t-il seulement un ? Je me le demande aussi parfois. Mais je pense que l’important ici, c’est que les gens ont peur d’aborder ce genre de questions dans notre société. Les gens ont peur de parler des problèmes. Quand vous pouvez parler de vos problèmes, vous pouvez comprendre beaucoup de choses, et peut-être vous en sortir. Bien sûr, les drogues font partie de notre société, et nous devons en parler et écouter ce que les jeunes ont à nous dire.
Quel intérêt portez-vous à l’indifférence, voire même au désir, que ces jeunes éprouvent vis à vis de la mort et avez-vous d’autres projets sur ce thème ?
Je crois que ma génération a une pulsion de mort. D’une certaine manière, c’est une pulsion de vie : vivre sa vie de manière intense. Pour moi, le cinéma parle toujours de mort et d’amour, et, bien sûr, le cinéma c’est la vie. Je m’intéresse beaucoup à la dualité, entre eros et tanatos. Mon cinéma est très local, j’essaie de dépeindre ma ville et mes amis, et dans notre ville, la mort est juste au coin de la rue. Mon premier long métrage, ANHELL69, parlera aussi de cela.
Quel est l’avenir du format court métrage d’après vous ?
Des choses incroyables, pour moi les courts métrages sont un langage incroyable. J’essaie de regarder beaucoup de films courts, tout le temps, et je pense que le circuit du court métrage et l’engouement qu’il provoque sont en train de grandir. J’aime ce format et j’espère qu’il conservera toute sa créativité.
Demain on reconfine, quels plaisirs culturels conseillez-vous pour échapper à l’ennui ?
Hmm… Revoir des films classiques, regarder des courts métrages, écouter de la musique, prendre des drogues psychédéliques parce que ce sera la seule façon de voyager et bien sûr se masturber. Et se déconnecter d’Internet qui nous absorbe de plus en plus.
Pour voir Son of Sodom rendez-vous aux séances L3 de la compétition labo.