Lunch avec Tempête sur anorak
Entretien avec Paul E. Cabon, réalisateur de Tempête sur anorak
Comment avez-vous eu l’inspiration pour Tempête sur anorak ?
Le point de départ du film a été l’image d’un personnage, en haut d’une falaise, en pleine tempête, les bras tendus, qui subit le choc de la tempête et fait une sorte de test bizarre sur son anorak. A partir de là le reste a suivi.
L’avez-vous conçu comme une projection imaginée de ce que pourrait être un effet issu d’une consommation de substances psychotropes ?
Non, mais pourquoi pas !
Quels procédés d’animation avez-vous employés ?
Le film est un mélange de dessin animé image par image et de papier-découpé numérique.
Pourquoi avoir choisi de placer votre histoire dans un environnement hivernal, avec la présence de la neige et du froid ?
Si vous avez vu de la neige ce n’était pas mon intention ! Pour moi, le film se passe la nuit, avec une tempête, à une période de l’année indéterminée, mais libre à vous de l’imaginer en hiver.
Pourquoi des vaches ? Qu’apportaient-elles à l’ambiance du film ?
Les vaches sont à la fois maxi banales et maxi magiques. Il y a peu d’animaux qui peuvent se vanter de vivre ce paradoxe. Il suffit de regarder dans leur grands yeux pour y discerner la superposition de malice et d’ennui.
Aimez-vous les films comme The Big Lebowski des frères Coen ? Avez-vous d’autres références du genre ?
The Big Lebowski est un de mes films préférés. Les frères Coen sont une grande inspiration pour moi. Leurs histoires possèdent une ambiance chaotique et conservent leur mystère même après le film. Je pense notamment à A Serious Man, ou encore, dans un autre genre, à Burn After Reading. Ces films ont laissé une empreinte durable sur moi et influencent clairement mon travail.
Aviez-vous le jeu du petit chimiste étant enfant et avez-vous un goût particulier pour les aventures scientifiques ?
Tout à fait ! Je mélangeais tous les produits sans suivre les instructions (je crois d’ailleurs que c’est un peu ce que tout le monde fait). J’ai été assez déçu de ne pas parvenir à faire exploser la cave de la maison de mes parents. L’apparition du précipité rouge brique reste néanmoins un grand moment.
Dans Tempête sur anorak, vous questionnez aussi le rapport au regard sur soi avec le « selfie ». Notre société vit hyper connectée, pensez-vous que la représentation de soi-même – via par exemple les publications sur les réseaux sociaux – nous fasse agir différemment dans une situation donnée ?
Je n’avais pas conscience d’avoir soulevé le sujet avec Tempête sur anorak. Comme beaucoup de gens de ma génération, je baigne dans le flou en ce qui concerne ma relation avec les réseaux sociaux, l’angoisse molle de l’espionnage constant, la joie du like, le partage automatique des moments clés et l’abus de smileys.
Vous donnez à voir l’attraction physique entre votre personnage féminin et l’un de vos personnages masculins par des procédés humoristiques en évitant la question affective éventuellement liée à cette attraction. Pourquoi avoir choisi d’utiliser cet effet comique ?
Les deux personnages amoureux du film sont très timides et maladroits. Ils n’ont pas fini de se rencontrer quand le film se termine. Ils n’oseront exprimer leur affection ouvertement que plus tard, mais ça ne les empêche pas de faire travailler leur imagination entretemps. Je n’ai pas souhaité esquiver la portée affective de leur relation mais le film n’en montre que les prémisses. C’est le moment propice pour en rigoler.
Tempête sur anorak a été produit en France. Selon vous, dans le court métrage, qu’est-ce que la production française apporte que les autres n’ont pas ?
Nous avons la chance de profiter d’organismes de subvention qui permettent de réaliser des courts métrages et de vivre de ce travail pendant la fabrication du film. Le processus de sélection reste un marathon qui demande beaucoup d’énergie et de volonté, sans assurance d’obtenir l’aide suffisante au bout du chemin. Malgré tout, c’est une opportunité que les auteurs d’autre pays n’ont pas la chance de tenter et il faut être conscient de sa valeur.
Pour voir Tempête sur anorak, rendez-vous aux séance de la Compétition nationale F7.