Lunch avec Wañuy
Entretien avec Alejandro Roca Rey, réalisateur de Wañuy
Pouvez-vous nous en dire plus sur « Wañuy » et le sens de ce mot dans le film ? Que veut-il dire dans la bouche du guérisseur ?
En quechua, « Wañuy » signifie « mourir ». Mais comme vous le savez peut-être, le quechua est une langue très compliquée, comme nous, les êtres humains. La conjugaison est complexe et la langue a beaucoup de variantes d’une région à l’autre. Lors de mes recherches pour un autre projet, j’ai découvert que dans certaines communautés, « Wañuy » est un rituel où les gens s’échangent des peaux de bêtes et des vêtements pour symboliser le fait que notre énergie est « recyclée » sur Pachamama (la Terre nourricière) au moment de notre mort. Le message du film, à mon sens, c’est que parfois, quand on traverse des moments difficiles, il suffit d’une situation extrême pour nous remettre les pieds sur terre et nous faire voir les choses différemment. Pour moi c’est le nouveau sens du mot «Wañuy ». C’est la vie qui nous rappelle à l’ordre en disant : « Regarde autour de toi, ce pourrait être pire. Arrête de te lamenter et prends les choses en main. »
Les dialogues entre les personnages, bien que très minces (ils n’échangent que quelques mots), sont vraiment émouvants. Quel est le sens profond de cette conversation entre le chauffeur de taxi et ses passagers ?
Le dialogue entre le chauffeur de taxi et ses passagers est une métaphore évoquant les situations où nous ne nous comprenons pas bien, même entre Péruviens, à cause des barrières sociales et culturelles que nous n’avons pas su dépasser. Les locuteurs de langue quechua ne sont pas spécialement discriminés, mais il y a du racisme et de la discrimination à bien des niveaux, par exemple de la part des gens de la côte envers les gens de la montagne. Le quechua symbolise cette minorité d’une certaine façon, et je l’ai également choisi pour créer une situation où ni le chauffeur ni les spectateurs ne comprennent ce qui se dit.
Si vous êtes déjà venu à Clermont-Ferrand, pouvez-vous nous raconter une anecdote sur le festival ? Sinon, quelles sont vos attentes pour cette édition ?
Je ne suis jamais venu à Clermont-Ferrand. En fait, ce sera la première fois que je viens en Europe et je m’en réjouis d’avance. Wañuy est mon premier court métrage et c’est incroyable qu’il m’emmène si loin, dans tous les sens du terme. Je remercie du fond du cœur les personnes qui m’ont soutenu dans mon travail et qui ont cru en moi, surtout ma famille, mes producteurs associés, mon équipe et EPIC, l’école de cinéma où j’ai fait mes études à Lima, au Pérou.
Pour voir Wañuy, rendez-vous aux séances de la compétition internationale I1.