Breakfast avec Maniac
Entretien avec Bio Mirosseni, réalisateur de Maniac
Qu’est-ce qui vous a inspiré Maniac ?
Six mois avant de faire mon court métrage, j’avais séjourné dans l’hôtel que l’on voit dans le film. C’était pour le tournage d’une publicité et j’y ai passé une semaine tout seul à attendre le reste de l’équipe. D’abord, je pensais que ce serait l’endroit idéal pour me détendre, mais j’ai vite compris que c’était l’enfer. À part moi, il y avait juste une famille, ils avaient l’air de bien s’amuser et moi, j’étais vraiment seul et malheureux. C’est alors que l’idée du film a commencé à germer.
Avez-vous déjà passé des vacances ou travaillé dans un hôtel de luxe ?
Non, je n’ai jamais travaillé dans un hôtel. Les seules fois où je me retrouve dans un hôtel de luxe, c’est pour mes déplacements professionnels.
Au début de Maniac, le personnage est interrogé sur ses origines par le réceptionniste. Pourquoi avoir choisi de commencer le film sur cette scène ?
Quand je suis en Europe, il est fréquent qu’on me demande d’où je viens. Je réponds que je suis américain. Mais on me demande alors d’où je viens « vraiment ». Je réponds que je suis américain, que je viens de Californie, de Los Angeles. Je ne suis pas blond aux yeux bleus alors on pense que je ne suis pas américain, il y a parfois – mais pas toujours – une touche d’idéologie raciste là-dedans.
Avez-vous parfois besoin de solitude pour créer ?
Tout dépend de la situation. Quand on voyage beaucoup pour des tournages, on se retrouve souvent seul à l’hôtel, donc c’est sans doute le cas. Mais ce n’est pas quelque chose que je recherche intentionnellement.
Pensez-vous que solitude rime avec ennui ?
Difficile à dire. Ça dépend des gens, je crois. Certaines personnes arrivent très facilement à se distraire, d’autres s’ennuient tout de suite. À l’époque d’Internet, il est plus difficile de s’ennuyer, à mon avis.
Pensez-vous qu’il y ait plus de solitude aujourd’hui qu’il y a 50 ou 100 ans ?
Sans aucun doute. Je le répète, nous sommes à l’époque d’Internet. Les gens sont pendus à leurs téléphones et à leurs ordinateurs, il y a moins de communication directe, et on consulte de plus en plus Facebook, Instagram et les blogs. J’adore Internet, je suis à fond pour. Mais je pense qu’à cause d’Internet, nous sommes de plus en plus seuls.
Dans Maniac, votre personnage va transgresser les règles, comme le font les enfants. À votre avis, pourquoi a-t-il ce besoin de défi ? La transgression fait-elle le bonheur ?
Le personnage arrive à un stade où, pour se distraire, il doit faire des choses étranges ou interdites. Dépasser les limites peut rendre heureux. Enfin, ça dépend de ce qu’on fait exactement. En plus, l’hôtel a des règles très strictes, ce qui, pour le personnage, crée un conflit salutaire. Il n’a pas le droit de dormir dans le hall et il se fait déloger par une employée. Parfois, plus les règles sont strictes, plus on a envie de les défier.
Êtes-vous allé dans des villes très riches comme Los Angeles ? Connaissez-vous les « gated communities » ?
Oui, je suis de Los Angeles, donc je connais très bien les « gated communities ». C’est un sujet intéressant. Ce qui m’a toujours étonné, c’est que si on veut y entrer ou en sortir par effraction, rien de plus facile. Ce ne sont pas des prisons… Enfin, si, dans un sens !
Maniac est une production française. Selon vous, dans le court métrage, qu’est-ce que la production française apporte que les autres n’ont pas ?
Le film a été tourné en Espagne mais produit par Partizan, une boîte française qui appartient à Michel Gondry et Georges Berman.
Pour voir Maniac, rendez-vous aux séances de la Compétition nationale F4.