Dîner avec Norte (Nord)
Entretien avec Javier García, réalisateur de Norte (Nord)
Qu’est-ce qui vous a poussé à faire un film sur ce programme ?
Je me suis toujours intéressé à l’exploration de l’esprit humain à travers le cinéma. Un jour, Sergio Arróspide m’a fait lire son scénario et je suis instantanément tombé amoureux de son texte. Il s’inspire d’une histoire vraie. Les autorités basques ont lancé un dispositif de « rencontres réparatrices en face à face », au cours desquelles la victime était enfermée dans la même pièce que l’ex-terroriste de l’ETA. Le but de ces rencontres était de leur apporter à tous deux une certaine sérénité.
Que pensez-vous de cette condition selon laquelle on ne doit ni s’excuser ni pardonner ?
Faire des excuses ou pardonner, ce n’était pas le but de ces rencontres. Pour avoir le droit de participer, le terroriste devait avoir renié le groupe ETA et avoir exprimé des regrets. Le but était de trouver un sujet commun qui permettrait de retrouver la paix intérieure. Je pense que c’est le seul moyen d’avancer. Le ressentiment ne sert à rien, il aggrave même les choses pour la personne qui en a.
Pourquoi avoir choisi ce titre ?
C’est une métaphore de la géographie et de l’esprit. Le Pays Basque est situé au nord de l’Espagne, mais on dit aussi en espagnol « perdre le nord » pour désigner un état de confusion mentale qui, s’il survient dans la jeunesse, peut amener une personne à commettre des actes qu’elle regrettera plus tard.
Parlez-nous de votre style cinématographique (vous filmez un personnage, puis l’autre) et de votre scène finale.
J’ai choisi de filmer en plan-séquence pour plusieurs raisons. La première, c’est que cela oblige le spectateur à accompagner l’acteur avec plus d’intensité que s’il y avait des raccords. Braquer la caméra sur un personnage plutôt qu’un autre est logique lorsqu’on veut que le spectateur écoute ce que disent les personnages. En outre, le fait de ne pas voir la réaction de l’autre ajoute une certaine tension. Et la caméra n’est pas positionnée de façon symétrique. Elle est plus proche de l’ex-terroriste. La raison est que l’on a forcément un préjugé à l’encontre de l’ex-terroriste, et je voulais tenter d’en faire table rase. La caméra se rallie à lui pour créer un équilibre. Le mouvement de la caméra converge vers la fenêtre, ce qui symbolise le chemin de la lumière mais aussi la liberté. Les croisillons de la fenêtre dans la scène finale symbolisent les barreaux derrière lesquels vit le terroriste.
Quels ont été vos coups de cœur au cinéma l’an dernier ?
J’adore des films comme Coherence de James Ward Byrkit, ou The Lobster de Yorgos Lanthimos. Ils mettent tous les deux en scène la nature humaine dans des situations extrêmes. Pour Coherence, ce qui m’a frappé, c’est qu’on puisse faire un film aussi impressionnant avec un si petit budget.
Si vous êtes déjà venu à Clermont-Ferrand, pouvez-vous nous raconter une anecdote sur le festival ? Sinon, quelles sont vos attentes pour cette édition ?
Malheureusement, je ne suis jamais venu, mais j’y serai cette année avec mon producteur Manuel García, et c’est avec plaisir que nous rencontrerons d’autres réalisateurs, et que nous participerons à un des meilleurs festivals du monde. Nous sommes heureux et très fiers.
Est-ce que vous participerez à d’autres événements pendant le festival de Clermont-Ferrand (débats « Expresso », conférences ou autre) ?
Norte sera présent sur le stand « Shorts from Spain » où vous pourrez nous trouver en train de siroter un café et de discuter avec ceux qui souhaiteront nous rencontrer pour échanger sur le film ou sur d’autres projets.
Pour voir Norte, rendez-vous aux séances de la compétition internationale I4.