Lunch avec Bermuda (Bermudes)
Entretien avec Erik Warolin, réalisateur de Bermuda (Bermudes)
Est-ce que le café est inspiré d’un lieu que vous connaissiez ? Où se trouve-t-il ?
C’est l’un des nombreux restaurants remarqués lors de nos repérages.Ce qui était primordial pour l’histoire, c’est que les baies vitrées soient suffisamment grandes pour que la voiture reste dans le cadre pendant la conversation des deux femmes. Ce n’est donc pas un café où j’ai mes habitudes mais un lieu qui se trouve à une heure au sud de Stockholm et que Sam Safinia, le producteur, a repéré alors qu’il travaillait sur un autre projet. Quand il me l’a montré, j’ai trouvé que ça collait parfaitement.
Est-ce que le fait qu’il y soit question des Bermudes a une signification particulière ?
J’ai beaucoup réfléchi à ça. Parce que cette conversation paraît tout de suite étrange et que spontanément, on n’y croit pas. Il était donc important de dissocier ce que dit la femme et comment elle le dit. Si on fait abstraction du comment, ce qu’elle dit peut paraître plausible. Et les Bermudes, c’est le numéro 1 des paradis fiscaux classés par Oxfam et la plupart d’entre nous associent cet endroit au mythe et aux dangers du Triangle des Bermudes, ce qui rendait à mon sens la destination d’autant plus aventureuse.
Le film a un ton très pince-sans-rire. Diriez-vous que c’est typique de l’ensemble de votre travail ? Quels sont les autres genres que vous aimeriez explorer ?
J’ai travaillé sur des téléfilms mais c’est mon premier court métrage. Je n’ai donc pas de point de comparaison. Pour ce qui est du genre, je trouve que ce type de comédie est le genre le plus excitant. Il y a quelque chose de vraiment intéressant à raconter une histoire qui est drôle sans que ce soit une histoire drôle. Enfin si ça a du sens bien sûr ! Quelqu’un de brillant a dit un jour (je n’arrive pas à me rappeler qui, peut-être bien Aaron Sorkin) qu’il n’y avait rien de plus difficile et réjouissant que de faire rire avec une histoire qui n’est pas drôle. Je partage tout à fait ce point de vue.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur votre formation de réalisateur ?
Alors mon parcours est assez différent de celui des autres. J’ai fait des études d’économie, marketing, publicité et travaillé quelques années dans la pub. Ce n’est qu’après que j’ai décidé de voir si ma passion pour la réalisation pouvait se transformer en carrière. Et là, j’ai eu la très grande chance d’intégrer d’emblée SVT Drama (l’équivalent suédois de la BBC) où j’ai acquis toute mon expérience de terrain en faisant feu de tout bois. C’est là aussi que j’ai eu l’occasion de rencontrer, d’apprendre et de travailler avec les brillants professionnels de tous les secteurs. J’y suis resté quelques années avant de devenir freelance et travailler pour des séries télé, etc.
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées en particulier ?
Je trouve que le format court est intéressant pour un certain nombre de raisons mais malheureusement… rien qui ne ressemble à la liberté ! En fait, c’est plutôt le contraire. Parce que quand vous racontez une histoire courte, votre but devrait être de faire court… Et ça, c’est très difficile pour la plupart d’entre nous parce qu’on ne peut pas s’empêcher de supprimer, rajouter, supprimer, rajouter… Et quand je regarde des courts métrages, il me semble que la plupart (y compris les miens) pourraient et devraient être plus courts. Quand on regarde un film qui fait entre 90 et 120 minutes, on a le temps de capter le rythme de l’histoire. Et même si on ne sait pas qu’on le sait, on le sait. Mais parce qu’un court métrage varie de 1 à 60 minutes, le spectateur ne sait pas à quoi s’attendre. Il essaie de déterminer de quoi il s’agit. Ce qui veut dire qu’à chaque seconde, on lui demande un peu de patience. C’est pour ça que nous devons être très concis et précis dans notre narration si l’on ne veut pas qu’il s’ennuie et décroche. Ce qui rend la réalisation de court métrage à la fois exigeante et exaltante.
Pour voir Bermuda (Bermudes), rendez-vous aux séances de la compétition internationale I3.