Goûter avec Destete (Sevrage)
Entretien avec Inés Gowland, réalisatrice de Destete (Sevrage)
À quoi le titre fait-il référence ?
Destete (sevrage en français) est le mot désignant le changement d’alimentation d’un bébé mammifère qui, privé du lait maternel, passe à son alimentation d’adulte. Chez les humains, ce processus s’opère de manière progressive, mais pour le bétail, il s’agit d’une séparation brutale. Un jour, la vache et son veau sont séparés. Ils s’appellent alors l’un l’autre des jours durant, en poussant des meuglements que l’on peut entendre à des kilomètres à la ronde. Destete fait référence à cette séparation brutale qui a lieu subitement, sans précautions.
Pouvez-vous nous parler du lieu du tournage ? Cette ferme se trouve-t-elle dans un endroit que vous avez bien connu ?
Nous avons tourné près d’Ayacucho, une petite ville de la province de Buenos Aires, où j’ai eu la chance de passer la plupart de mes vacances. Le fait de bien connaître la région et ses habitants m’a donné une certaine liberté pour trouver l’endroit idéal pour l’histoire. La demeure que nous avons finalement choisie est une ferme que j’avais visitée lorsque j’étais petite et pour laquelle j’avais gardé une grande affection. Ce fut donc un vrai privilège de tourner à cet endroit.
Quel est le rôle d’Ernesto dans la ferme ? La situation de Teresa est-elle assez banale ?
Ernesto est responsable de la ferme au quotidien. Il s’occupe des terres et travaille avec le propriétaire pour que toutes les tâches soient effectuées, comme le déplacement du bétail d’un endroit à un autre, la surveillance des cultures, etc. Son rôle et sa relation avec la terre peuvent l’amener à être considéré comme un des leurs par certains membres de la famille, ce qui peut parfois le conduire à se prendre pour le maître des lieux. Lorsque le propriétaire change, ce confort et ce statu quo sont menacés. Ce qui est banal dans la situation de Teresa, c’est sa façon de prendre les choses en main, avec un certain mépris pour la tradition et un manque de considération envers les personnes de classe sociale différente.
Comment s’est passé le tournage avec les chevaux ?
Nous avons vraiment eu de la chance avec tous les animaux. Comme ils faisaient partie de la ferme, rien n’était inhabituel pour eux. Les chevaux étaient particulièrement faciles à diriger car ils étaient très dociles, et il nous a fallu les monter seulement pour quelques prises. Nous avons aussi eu de la chance avec les vaches : le contrôle de leur gestation devait justement être effectué cette semaine-là. Nous avons alors planifié la scène importante avec les vaches en fonction de ce contrôle, puisque nous savions que les vrais fermiers et le vétérinaire seraient là. L’équipe n’a donc pas eu à gérer cela. Je dois quand même dire qu’à la fin de la journée, après avoir tourné au milieu de 400 vaches, nous avions oublié ce qu’était le silence.
Quels sont vos projets à venir ?
Je suis actuellement en train de travailler sur mon premier long métrage, qui se déroulera également en Argentine. J’espère aussi tourner un autre court métrage à New York à la fin de l’année. Ce sera une comédie basée sur une histoire de la bible que ma mère déteste.
Diriez-vous que le format court vous a donné une certaine liberté ?
Le format court m’a vraiment donné l’espace pour m’exercer. Il permet d’explorer ce que l’on veut faire sans le risque existant dans un projet plus long. Je m’intéresse à la comédie, et les courts métrages m’ont donné la possibilité de me tester, de chercher le ton qui me correspond le mieux, d’atteindre les limites du genre, dans les différents sens du terme, et, je l’espère, de trouver un équilibre. Je crois que cette exploration se retrouve dans mon travail : après quelques courts métrages sur des comédies plus générales, j’ai voulu travailler sur quelque chose de plus calme, avec plus de sous-titres, ce qui a donné Sevrage.
Destete (Sevrage) a été sélectionné en compétition internationale (I4).