Goûter avec Interiør (Intérieur)
Entretien avec Reed Van Dyk, réalisateur de Interiør (Intérieur)
Pourquoi avez-vous choisi ce titre ?
Je ne sais pas trop. Comme toutes les décisions artistiques, il s’agit principalement d’une réaction à fleur de peau, d’un instinct. Je pourrais vous donner une justification intellectuelle du titre, mais ce serait rasant. Je ne me souviens même pas quand j’en ai eu l’idée. En tout cas, c’est le titre depuis le début du projet. Après la phase de postproduction, j’ai vaguement envisagé d’autres options, mais «Interiør» est resté. Sans doute à cause de son sens assez vaste en tant que mot et en tant que titre. Il peut signifier plein de choses différentes.
Situé dans l’espace confiné d’un immeuble, le film est étouffant et sombre. Pouvez-vous nous parler de votre usage de la lumière et de l’ombre pour exprimer la relation entre le garçon et sa mère ?
Il m’est difficile d’expliquer exactement ce que Greta Zozula, ma directrice photo, et moi-même avons fait avec la lumière, car ces « décisions » se prennent en général de façon inconsciente. J’avais tout de même au départ une vision globale de la lumière du film, que nous avons affinée ensemble scène par scène. En revoyant le film à présent, je constate que l’apparence d’une relation ou d’une vie « normales » entre la mère et son fils est (tout juste) préservée dans les scènes de jour, mais qu’elle s’effondre la nuit, lorsque ressortent les frustrations et les espoirs de chacun.
Comment avez-vous trouvé le jeune acteur ?
En fait, j’ai d’abord essayé de faire le film en Norvège. Puis au Danemark. Et j’ai fini par trouver les lieux de tournage que je cherchais à New York (où j’ai grandi). J’ai décidé que l’action se déroulerait tout de même à Oslo, car je voulais vraiment travailler avec Ane Dahl Torp (qui joue le rôle de la mère). Bref, tandis que je cherchais des acteurs à Copenhague, j’ai rencontré une fabuleuse directrice de casting, Annette Grunnet, à qui j’ai demandé de poursuivre les recherches au Danemark pendant que je tentais ma chance à New York en collaboration avec Emer O’Callaghan, notre directrice de casting aux États-Unis. Une semaine plus tard, Annette m’a fait parvenir trois vidéos. La première que j’ai visionnée était celle de Jens Iversen. J’ai tout de suite su que c’était le bon. Nous avons continué à tester de jeunes garçons dans les semaines suivantes, histoire d’épuiser toutes les possibilités, mais en sachant pertinemment qu’on prendrait Jens. Je n’aurais jamais pu faire ce film sans lui, sans Annette, et sans la famille de Jens (notamment sa mère, Marlene) qui a été formidable et nous a accompagnés à New York pour le tournage.
Qu’est-ce qui vous a amené à aborder ce thème en particulier ?
Tandis que je faisais des recherches pour mon dernier film, DeKalb Elementary, j’ai lu un livre intitulé One of Us de Asne Seierstad. Il parle d’Anders Breivik et de la Norvège qu’il a connue. J’ai été fasciné (et attristé) par des détails de son enfance, notamment sa relation avec sa mère. On pourrait dire que Interiør a été librement (très librement) inspiré de Breivik, mais mon histoire et ses personnages sont fictifs.
Quels genres et quels thèmes aimeriez-vous aborder en tant que réalisateur ?
Il n’y a pas de genre qui m’intéresse en particulier, ni de sujet que j’aie envie de traiter. Un film à la fois. En ce moment, j’écris un scénario situé dans l’Amérique des années 1940 et abordant les problèmes raciaux, mais je n’ai encore rien entrepris en dehors de l’écriture. Quand j’aurai terminé, j’attendrai que le sujet suivant s’impose à moi.
Diriez-vous que le format court vous a donné une certaine liberté ?
Oui. Pour les courts métrages, les budgets sont limités, j’assure donc seul la partie artistique (scénariste/réalisateur), ainsi que la partie « studio », en quelque sorte. Par conséquent, je supervise tout, ce qui veut dire que j’ai une liberté artistique totale. Et ce dans toutes les phases de la production – le casting, le montage, etc. Pour les longs métrages, par exemple, un réalisateur doit négocier un « montage final » (ou validation finale du montage) dans le contrat. En court métrage, ça tombe sous le sens.
Interiør (Intérieur) a été projeté en compétition internationale.