Goûter avec District 16, 16 Floors, 16 People (Quartier n°16 – 16 étages, 16 habitants)
Entretien avec Tatevik Vardanyan, réalisatrice de District 16, 16 Floors, 16 People (Quartier n°16 – 16 étages, 16 habitants)
Qu’est-ce qui vous a donné l’idée de parler de ce quartier d’Erevan ?
Mon pays est petit, et les villes aussi sont petites, y compris la capitale Erevan. L’avantage de vivre dans une petite ville, c’est qu’on finit par la connaître à fond. Si vous me posez la question, je vous dirai que j’ai toujours su que ces bâtiments avaient une histoire, mais je ne sais plus qui me l’a dit ni quand je l’ai su, mais j’ai grandi en connaissance de cause. Je prenais ces immeubles soviétiques en photo, j’étais fascinée par ces structures. Dès que j’ai envisagé de faire un premier film, j’avais la certitude de devoir raconter l’histoire des gens qui vivent dans ces structures. Je trouvais le coup des lettres CCCP tellement incroyable que j’ai choisi ce quartier. J’ai moi-même grandi dans un de ces immeubles soviétiques et j’ai vécu beaucoup de choses qui sont évoquées dans le film.
Comment avez-vous trouvé les personnes à interviewer ? Les résidents se sont-ils volontiers prêtés au jeu ?
Trouver les gens a été l’aspect le plus difficile, mais aussi le plus passionnant. Je m’y suis prise de deux façons différentes : d’abord, j’ai demandé autour de moi qui habitait ce quartier ou y connaissait des gens avec qui je pouvais être mise en contact. Puis, de façon plus traditionnelle, je me suis rendue sur place, j’ai traîné et j’ai abordé les gens comme ça, en leur demandant si je pouvais les interviewer. Ça peut paraître dingue, mais les deux techniques ont marché. La plupart des gens sont d’accord pour discuter mais pas pour être filmés. Je me souviens avoir partagé le repas de Pâques avec une des familles du quartier en compagnie de mon caméraman, Vahe, et après des heures passées ensemble, ils ont déclaré qu’ils ne voulaient pas être filmés.
Les témoignages sur la vie dans ces tours font penser à bien d’autres habitants de ce genre d’immeubles dans le monde entier. Pensiez-vous que votre film pouvait avoir cette portée universelle ?
Les témoignages relatent en effet des problèmes rencontrés couramment après des années passées dans ce type de logement. J’imagine que dans beaucoup de villes du monde entier, les spectateurs s’y retrouveront. Et cela me réjouit, car il est important que ces voix soient entendues. Et puis cela permet aux spectateurs de s’identifier aux histoires racontées dans le film.
Que pensez-vous des différentes opinions exprimées par les résidents au sujet de la période soviétique ?
C’est une question difficile. Je suis née juste avant l’effondrement du régime, et j’ai vécu mon enfance dans un pays qui s’adaptait avec peine à sa nouvelle indépendance. J’ai trouvé difficile de sélectionner ces opinions au montage car je pensais tout le temps à mon père et à mon grand-père, qui avaient les mêmes discussions. Au final, tous les résidents ont partagé leur expérience avec moi en essayant de s’exprimer le plus honnêtement possible sur le passé et le présent.
Avez-vous envie de réaliser d’autres documentaires ? Ou de vous lancer dans la fiction ?
J’adorerais faire les deux. Pour le moment, encore des documentaires, j’espère, car j’ai de nouvelles idées, et je suis déjà en train de tourner un autre court métrage qui sera plus personnel, car il parle de ma famille. À l’avenir, j’aimerais faire un court métrage de fiction et acquérir de l’expérience.
Diriez-vous que le format court vous a donné une certaine liberté ?
Personnellement, je pense qu’il donne une certaine liberté dans le choix du sujet, mais qu’il est bien plus difficile de monter un court métrage qu’un long. Mais avec l’expérience, on apprend à cibler ce qu’on filme en anticipant sur le montage.
District 16, 16 Floors, 16 People (Quartier n°16 – 16 étages, 16 habitants) a été projeté en compétition internationale.