Dîner avec El infierno y tal
Entretien avec Enrique Buleo, réalisateur de El infierno y tal (L’enfer, etc.)
Pourquoi avoir choisi d’évoquer un milieu rural ?
Je viens d’un petit village de La Mancha, il est donc naturel pour moi de situer mes histoires en milieu rural. Même si cela fait quinze ans que j’habite en ville, j’ai passé mon enfance et mon adolescence à la campagne et cela a fortement marqué ma personnalité.
Dans quelle mesure vous intéressez-vous à la solitude ? Avez-vous d’autres projets sur ce thème ?
D’une façon générale, je m’intéresse aux ratés, aux exclus qui font preuve de détermination, de volonté. Ces gens connaissent en général la solitude. Dans un de mes futurs films, intitulé Relato de salvación, la solitude tient également une place importante.
Comment avez-vous travaillé sur l’élaboration des personnages ? Y a-t-il des différences entre le scénario et le film ?
Je m’efforce toujours de travailler sur l’élaboration des personnages et sur l’intrigue en même temps. Cela dit, il arrive que l’intrigue définisse les personnages, ou que les personnages aient une influence sur l’intrigue. Pour El infierno y tal, je savais d’emblée quels types de personnages je voulais créer : une mère et un père qui font souffrir leur fille sans s’en rendre compte. Je voulais un père agressif et ridicule, une mère hypocrite et absurde, une sorte de version macabre et idiote de Matilda. Le scénario et le film sont similaires, à part quelques scènes que j’ai raccourcies au montage dans un souci de rythme.
Pourquoi avoir ajouté la question du handicap ?
J’ai pensé au handicap car cela rendait le personnage plus fragile, moins à même de fuir ses parents. Mais pour moi, le handicap n’est pas un thème important du film.
La séquence du camp de concentration était-elle importante ?
Cette séquence explique le caractère irrationnel de la mère. Dans un sens, elle se croit victime d’un camp de concentration. C’est aussi à ce moment-là que l’on comprend que la fille pense à fuir son existence misérable.
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées ?
Je ne pense pas que le format court donne en soi quelque liberté que ce soit. Il y a des longs métrages bien plus imaginatifs et créatifs que beaucoup de courts métrages, qui peuvent être parfois très scolaires et conventionnels. Ce qui me donne la liberté de faire des courts métrages comme El infierno y tal, c’est le fait que le cinéma n’est pas mon gagne-pain.
Quelles sont vos œuvres de référence ?
J’ai des goûts très éclectiques, mais je me sens particulièrement influencé par des cinéastes européens comme Ulrich Seidl, Jessica Hausner, Aki Kaurismäki, Pedro Almodóvar, Werner Herzog, des réalisateurs américains comme Jim Jarmusch, Woody Allen, Rodrigo García, Amat Escalante ainsi que le Canadien David Cronenberg.
Pour voir El infierno y tal (L’enfer, etc.), rendez-vous aux séances du programme L2 de la compétition labo.