Lunch avec 405
Entretien avec Shanawaz Nellikunnil, réalisateur de 405
Votre film est très poétique, et évoque magnifiquement le regret. Que va en retirer le public, à votre avis ?
Merci du compliment. Je voudrais que le public sache ce qu’est vraiment la liberté. On oublie souvent de penser à ce qu’on a, en accordant trop d’importance à ce qu’on pense ne pas avoir.
Il y a beaucoup de longs plans et de lenteur dans votre film. Avez-vous choisi cette façon de filmer pour que le spectateur puisse s’investir émotionnellement ?
Je voulais que le spectateur ressente ce que j’ai ressenti lors de mes recherches pour ce film. J’ai interviewé des condamnés à perpétuité en liberté conditionnelle, ainsi que des gardiens de prison. Durant l’une de ces interviews, qui a bien duré 3-4 heures, j’étais très crispé et j’avais de la peine pour le condamné, même s’il essayait de garder la face et de paraître relativement heureux. Plus je passais de temps avec lui, plus je ressentais d’empathie à l’égard de sa situation. J’ai compris que la meilleure façon de restituer cela dans le film était de forcer le spectateur à regarder le personnage jusqu’à se sentir mal à l’aise.
Quels sujets vouliez-vous aborder avec ce film ?
Avant de commencer le film, il était clair que nous ne voulions pas créer un contenu grand public, bien que la plupart des distributeurs de courts métrages en Inde cherchent des films qui aient des acteurs connus ou un rythme endiablé et une fin spectaculaire pour satisfaire les spectateurs en ligne. Ma productrice nous a assuré qu’elle laisserait le film évoluer naturellement plutôt que d’essayer de changer notre vision des choses pour l’adapter aux exigences du marché. Si nous arrivons à trouver un bon distributeur, ce sera un bon exemple à suivre pour encourager les jeunes réalisateurs à élargir l’éventail des sujets à exploiter dans leurs films.
Pouvez-vous nous parler du tournage ?
Le tournage a été vite fait, avec une équipe réduite. En Inde, beaucoup de films sont tournés dans ce coin, et le plus délicat était de faire en sorte qu’on ne reconnaisse pas les lieux. Il a fallu beaucoup se déplacer. La pré-production a été très intense, donc une fois en phase de tournage, le plus important était de respecter le timing. Bien sûr, comme sur tous les tournages, nous avons eu des imprévus, mais l’équipe est restée soudée pour mener le travail à son terme. Parfois, on ne savait pas trop comment faire en sorte que le film fonctionne sans dialogues – la musique venait alors à notre secours. Mon acteur a dû faire quelque changements dans son physique et dans son attitude, il fallait constamment réinventer le personnage au détour de chaque scène.
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées en particulier ?
Ce qui est agréable dans les courts métrages, c’est qu’on est complètement libre d’enfreindre les normes en termes de structure et de narration. J’espère vraiment qu’à l’avenir, ces films seront pris plus au sérieux par les distributeurs.
Quelles sont vos références cinématographiques ?
J’ai beaucoup regardé de films ces vingt dernières années. Des réalisateurs comme Wes Anderson et Wong Kar-Wai, entre autres, m’ont appris à forcer la réalité pour créer une ambiance. Mais bien entendu, j’ai fini par chercher mon propre style et mes propres ambiances.
Pour voir 405, rendez-vous aux séances du programme I2 de la compétition internationale.