Breakfast avec Déjalo Ser
Entretien avec Txema Novelo, réalisateur de Déjalo Ser
Avec quelles caméras avez-vous filmé ? Comment avez-vous créé cet effet années 80 ?
J’ai tourné Déjalo Ser entièrement sur film négatif couleur en Super Huit. Nous avons utilisé la seule caméra qui à ma connaissance permet encore de synchroniser le dialogue et les ambiances sans passer par un enregistreur extérieur depuis la mort du Super Huit. C’est une Beaulieu 6008 qu’un conducteur de métro m’a vendu l’an dernier à Berlin.
Pourquoi vouliez-vous décrire une quête d’inspiration ?
J’ai pensé que c’était l’excuse parfaite pour créer une intrigue. Le film est aussi un hommage à certains cartoons Hanna Barbera des années 50 et 60, comme Le Pacha. Je voulais qu’il y ait une sorte de conflit mais façon cartoon alors j’ai pensé qu’un voyage pour trouver l’inspiration servirait parfaitement mon objectif.
Votre histoire raconte deux approches différentes et deux points de vue différents sur ce voyage, pourquoi vouliez-vous créer cet effet ?
Eh bien, c’est à l’image du film et son analogie étrange entre les Beatles et Yoko Ono. Je voulais avoir les deux points de vue sur ce voyage, le regard féminin et le regard masculin. C’est une sorte d’équilibre Est-Ouest ou Yin Yang…
À quel point avez-vous besoin de chercher l’inspiration vous-même ? Est-ce difficile de trouver des choses originales à exprimer ?
En fait, je n’ai pas tellement besoin de chercher l’inspiration pour être honnête, ce film est venu aussi vite qu’une pensée à mon esprit et l’écriture m’a pris deux semaines tout au plus. Alors non, je dirais qu’il n’est pas difficile pour moi de trouver des choses originales à exprimer. Avec ce film, je pense que je voulais juste romancer la « simplicité » à l’image de cette formule cinématographique qui marchait fabuleusement pour moi de l’époque du film « classique ». Le Fresnoy est une école géniale mais la technologie et la recherche permanente d’ « originalité » a créé une sorte de « prétention » et un ultimatum à réinventer le langage cinématographique. Je trouve que le résultat est une intention terne, ennuyeuse, lisse et emprisonnée, qui actuellement empoisonne le cinéma estudiantin contemporain. Alors j’ai mis énormément d’efforts dans ce film pour essayer d’aller dans le sens opposé.
Pourquoi avez-vous choisi Oaxaca comme décor ? Avez-vous de la famille là-bas ?
J’ai choisi la région Oaxaca car la Sierra Tarahumara est trop loin de Mexico, alors suivre les pas d’Artaud était un peu démesuré. Et ce dont j’avais besoin était simplement d’un psychotrope puissant et naturel comme excuse pour le road-trip, et puisque les champignons avaient eu un effet puissant sur moi par le passé et pas seulement le peyotl, j’ai pensé que Oaxaca serait parfait. De plus il y a une légende qui dit que les Beatles ont écrit Let it be après que Paul ait fait un bad trip à base de champignons à Huautla de Jiménez dans la région d’Oaxaca, lors d’un séjour avec María Sabina. Mais il est difficile de savoir si c’est un fait réel ou pas.
À quel point êtes-vous intéressé par le Savoir Traditionnel des peuples indigènes et le travail d’Antonin Artaud ? Pensez-vous faire d’autres films autour de cette thématique ?
Je pense être en fait plus intéressé par le Savoir des peuples indigènes que par le travail d’Antonin Artaud. Mais je respecte l’homme et j’aime le fait que d’un certain point de vue, fatigué de ce qu’il appelle la « décadence occidentale », il ait essayé de trouver des réponses dans d’autres espaces, à travers une vision et une cosmologie différentes. J’ai appris qu’il y avait une tendance actuellement en Europe appelée « Néo-chamanisme », des chamanes d’Amazonie sont amenés dans les villes d’Europe pour pratiquer des rituels Ayahuasca lors de rave parties et ce genre de choses. Aussi fou que cela puisse paraître, j’apprécie le « besoin » général de vouloir trouver des réponses dans des lieux différents, en particulier dans les sagesses anciennes. Mais pour répondre à votre question, je ne suis pas un réalisateur anthropologue et en ce moment j’écris une histoire de vampire satirique.
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées en particulier ?
Oui, il me semble. J’aime les formats courts et par conséquent les histoires courtes. Je suppose que je suis comme la plupart des réalisateurs, personne ne veut réaliser perpétuellement des courts mais cet art est un bon scénario pour gagner en confiance et peaufiner ses capacités.
Si vous êtes déjà venu, racontez-nous une anecdote vécue au Festival de Clermont-Ferrand ?
Sinon, qu’en attendez-vous ?
Je n’ai jamais été à Clermont-Ferrand alors j’espère matérialiser cette année une anecdote qui vaudra le coup d’être racontée dans l’avenir. Je suis extrêmement heureux que mon film soit sélectionné dans la compétition internationale, et assez satisfait de voir que les français (probablement plus que dans tout autre pays au monde) accordent aux courts métrages l’importance dont ils ont tant besoin. J’espère aussi voir quelques collègues du Fresnoy dont les films sont en compétition, ouvrir plein de bouteilles de vin et manger autant de fromage que possible.
Pour voir Déjalo Ser, rendez-vous aux séances de la compétition internationale I7.