Édito – Compétition labo 2021
120 BPM
Le labo a 20 ans et son cœur bat fort. Il y a un rythme, une musique, la pulsion est là, une Pulsion créatrice, cette urgence que Vincent Menjou-Cortès retranscrit si bien dans son film, il faut que ça sorte !
Pour cette édition unique, une sélection exceptionnelle, bourrée de surprises, et une confirmation : le documentaire est un des terrains de jeu préférés des artistes contemporains. En effet, pas moins de dix courts métrages de ce format irriguent cette sélection.
Parmi eux, Paz Corona filme un pays qui ne se tient pas sage, elle signe avec Santiago 1973-2019 un brûlot furieusement politique, fiévreux et glaçant, écrit en état d’urgence et au plus près de la barricade.
Xacio Baño (primé en 2015 avec Ser e Voltar : prix CANAL+ et mention spéciale du jury) plonge en eaux troubles dans une Espagne en proie à la Guerre Civile avec un travail de recherche pétri d’une créativité et d’une poésie exceptionnelles : Augas Abisais a la modestie lucide des documentaires qui montrent le travail du temps, la parole incarnée, à l’écart des bruyantes imageries postmodernes.
Ismaël Joffroy Chandoutis est originaire de Clermont-Ferrand, enfant il a découvert le cinéma dans la salle Jean Cocteau de la Maison de la culture, il a été guidé et encadré en tant qu’élève de section cinéma au lycée Blaise-Pascal ; il illustre parfaitement le travail d’accompagnement de projets que fait l’association Sauve qui peut le court métrage tout au long de l’année : sélectionné avec ses deux films précédents, Ondes noires (2017) acheté par le Frac Auvergne, et Swatted (prix spécial du jury labo en 2019 et disponible sur le Blu-ray 20 ans de labo), il était en résidence d’écriture à Moulins l’année dernière pour un futur projet. Son dernier film, Maalbeek, sélectionné à la Semaine de la critique, revient avec subtilité sur les attentats qui ont endeuillé la Belgique en 2015, en trouvant la juste distance dans la mise en image des témoignages. Traquer de Noëlle Bastin et Baptiste Bogaert est une fascinante histoire de famille : le dialogue entre ces deux cousins sur fond de partie de chasse, activité honnie par l’une et adorée par l’autre, est des plus savoureux.
Les documentaires sous toutes leurs formes ne sont pas les seuls à prendre le pouls de notre monde : même la plus joueuse des animations, Orgiastic Hyper-plastic du vétéran britannique Paul Bush, pleine de couleurs et de musique, témoigne d’une société malade de sa surconsommation, qui a réussi à créer un sixième continent à partir de millions de tonnes de détritus plastiques charriés par les courants océaniques.
Alberto Vázquez, avec des orques, des sorcières et autres personnages dignes de Tolkien, retranscrit dans Homeless Home une société en crise, pleine de questionnements typiquement actuels. Il poursuit son œuvre unique, avec son style très personnel et des dialogues ciselés. Sangre de Unicornio et Decorado, deux de ses précédents courts métrages avaient eu les honneurs de la sélection clermontoise en 2014 et 2017. Son prochain long métrage Unicorns War aura sa première en mai 2022.
Achevé avant le premier confinement, le film Empty Places de Geoffroy de Crécy capture ces espaces désertés par l’homme avec une poésie colorée oscillant entre le fantastique et le tragique, comme dans cette scène où une canette de soda abandonnée, coincée dans un escalator, sautille en un mouvement sans fin. Augure de la crise qui allait nous frapper quelques semaines plus tard.
Le labo a 20 ans et son cœur bat fort, empli de cette irrépressible envie de montrer, faire réfléchir, dénoncer. En cette année si spéciale, cette compétition hors-cadre continue de vibrer, plus que jamais, grâce au regard que portent les réalisateurs sur un monde qui ne va pas toujours bien ; au beau milieu du cyclone leurs yeux crépitent, saisissant les plus belles images et des promesses de tentatives.
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