Humour noir
A Sense of History (Mike Leigh – Royaume-Uni, 1992)
Apparue chez Huysmans, déposée par Breton, dont il faut au passage rappeler que l’Anthologie fut censurée par Vichy en 1940, de quoi l’expression « humour noir » est-elle le nom ?
À l’heure où voir du « politiquement correct » partout n’est souvent qu’un tic de nouveau conformiste, il faudra sans doute, pour composer cette rétrospective, naviguer à vue, le cap proposé par la collision de ces deux mots n’étant pas des plus nets, entre l’oxymore et le pléonasme, selon l’humeur ou le point de vue. Breton penchait manifestement pour le deuxième, sa définition pouvant valoir pour l’humour tout court :
« L’humour noir est borné par trop de choses, telles que la bêtise, l’ironie sceptique, la plaisanterie sans gravité… (l’énumération serait longue), mais il est par excellence l’ennemi mortel de la sentimentalité perpétuellement aux abois — la sentimentalité toujours sur fond bleu — et d’une certaine fantaisie à court terme, qui se donne trop souvent pour la poésie (…). » 1
Si l’humour est la politesse du désespoir, on en était à se demander si l’humour noir pourrait passer pour son inconvenance, quand on découvrit que cette expression rebattue, attribuée à de nombreux auteurs (dont Boris Vian, et, plus récemment, Chris Marker), était en fait due au surréaliste révolutionnaire Achille Chavée, et — surprise ! — sous cette forme : « L’humour noir, c’est la politesse du désespoir. »
Nous confronterons donc l’aphorisme retrouvé à ces trois programmes de courts métrages, où il sera beaucoup question de la mort, fatalement… nous savons comment finit cette histoire !
« Au reste, est-ce qu’elle se gêne la mort, elle, pour se rire de nous ? Est-ce qu’elle ne pratique pas l’humour noir, elle, la mort ? » 2
On devrait bien rire, aussi.
1 – André Breton, Anthologie de l’humour noir.
2 – Pierre Desproges, Tribunal des Flagrants Délires.