Goûter avec Kymco
Interview de Marine Feuillade et Maxence Stamatiadis, réalisateurs de Kymco
Votre trio de personnages a moins de 18 ans, qu’est-ce qui vous intéressait dans cette période de la vie ?
On voulait que la mélancolie et la manière dont on ressent le poids de son environnement ne soient pas des questions d’âge ou de maturité. Nos personnages passent leur temps à faire toutes les conneries de la terre et donnent l’impression d’être inconséquents. Mais en fait c’est une manière de pallier l’ennui et la peur de l’avenir. Et quand ils ont épuisé tous leurs jeux, ils se retrouvent face à leur angoisse de finir eux aussi oubliés comme les ruines du paysage. Avoir des personnages jeunes, ça nous permettait de créer ce contraste.
Et où sont les adultes dans Kymco ?
Pour nos héros, l’avenir est inquiétant et vide. Pas d’avenir, pas d’adultes. Ceux qu’on croise sont tous à des stades de détérioration plus ou moins avancés, comme les décors. Un peu comme des monstres. D’ailleurs la mère à la fin reste terrée dans sa maison au lieu de sortir, comme s’ils avaient tous déjà un pied dans la tombe.
Qu’est-ce qui vous intéressait dans leur rapport au vide dans les espaces qu’ils parcourent ?
Marine : C’est toujours de créer ce contraste avec l’énergie débordante des enfants. Pour eux, tout ce décor pourri c’est autant de terrains de jeux pour tromper l’ennui. Mais finalement ça les rattrape, parce que c’est moche et tout cassé et qu’au bout d’une journée ils en ont fait le tour. Mais c’est leur seul horizon.
Maxence : Après, ça raconte forcément quelque chose de la Grèce d’aujourd’hui aussi. Par exemple, le parc aquatique dans lequel il zonent à la fin, quand j’étais petit, cet endroit venait d’ouvrir. Et c’était l’attraction de toute l’île. Et aujourd’hui, ça fait déjà 10 ans que c’est fermé et cassé. C’est un paysage qui se fige vite, tout finit à l’abandon, pas détruit, juste abandonné. Mais les gens vivent avec, il y a le soleil, la mer, le café pas cher. C’est un contraste bizarre et c’est encore plus flagrant avec des enfants surexcités.
Étiez-vous davantage intéressés par le questionnement du modèle du « grand frère » (et des rapports sociaux entre ces trois enfants aux âges échelonnés,) ou par celui des ambitions des personnages (en particulier celle de quitter leur environnement familier) ?
En fait, c’est pas vraiment des ambitions, c’est plutôt des rêves très lointains. Pour les enfants, il y a une urgence à partir mais nous on se dit qu’en vrai, ils partiront jamais. C’est pas le genre d’endroit où on a le sentiment que les ambitions vont se réaliser. C’est plus un lieu qui existe hors du temps, comme un été infini.
Pour ce qui est du modèle du « grand frère », le plus petit, finalement, c’est celui qui a l’air le plus sage. Les deux grands, ils font n’importe quoi et ils racontent des histoires abaracadabrantes. Mais le petit, il dit rien et du coup on a l’impression qu’il détient une vérité plus profonde, qu’il perçoit mieux la mélancolie environnante. Le petit, c’est en fait plus lui, le grand frère.
Y a-t-il une part d’images réelles dans Kymco ou seulement dans le générique de fin ?
Oui surtout pour Chikla, le petit. Quand on tourne, on filme toujours ce qui se passe entre les scènes, on n’arrête pas beaucoup la caméra. Donc, comme lui c’était un petit excité, il faisait toujours tout un tas de choses et nous, on le filmait tout le temps. Donc une partie des images viennent de là. Quand il joue avec le pistolet à la fin, par exemple.
Enfin, comment avez-vous travaillé les attitudes des frères entre eux ?
C’était vraiment pas très dur. Les deux « acteurs » qui sont pas des acteurs, sont copains dans la vraie vie. Et ils sont toujours un peu défoncés et alcoolisés. Du coup, ça leur venait assez facilement. Il y en a un des deux qui est naturellement plus réservé que l’autre. Au début, on a essayé de changer ça pour le rendre aussi énergique mais au bout de 10 minutes on a compris que ça marcherait pas donc on a accepté qu’un des personnages soit plus calme que l’autre.
Quels ont été vos coups de cœur au cinéma cette année ?
Marine : la série The OA, sinon je n’en ai pas eu.
Maxence : Bof. Dernier train pour Busan c’était bien. Par contre j’ai vu énormément de croûtes Marvel et DC et Arrival et Mademoiselle. C’était une année chargée.
Si vous êtes déjà venus, racontez-nous une anecdote vécue au Festival de Clermont-Ferrand ? Sinon, qu’en attendez-vous ?
Marine : Je suis venue une fois quand j’étais au Arts Déco avec la classe d’anim. Je suis pas sortie de la chambre, j’ai fait que fumer des joints et faire des crises de boulimie et j’ai pas vu de films.
Pour voir Kymco, rendez-vous aux séances de la compétition nationale F4.