Dîner avec Little Jaffna
Rencontre avec Lawrence Valin, réalisateur de Little Jaffna
Y a-t-il un côté autobiographique au film ? Au personnage de Seelan ? Pourquoi avoir choisi de parler de Little Jaffna ?
Un peu. Mes parents sont réfugiés politiques, ils ont fui la guerre et j’ai grandi avec les échos de ce conflit, très peu médiatisé. J’ai grandi sans figure paternelle et cela transparaît chez mon personnage principal. Il se construit seul et recherche une figure parentale pour compenser un manque chez lui. Je voulais mettre en avant la communauté Tamoule, très peu, voire mal représentée dans le cinéma français.
Visiblement les protagonistes sont touchés par ce qui se passe au Sri Lanka. Constate-t-on souvent un intérêt pour la politique du pays chez cette seconde génération de Tamouls parisiens ?
Oui, énormément. Pour beaucoup d’entre nous, une grande partie de nos familles se trouvent toujours au Sri Lanka, où seul quelques heureux élus ont pu venir en France. On a lien fort avec ce qui se passe là-bas. Pour ma part, je suis le premier de ma famille à être né en France et j’étais donc l’intermédiaire entre la langue française et ma famille. À 11 ans, je rédigeais des demandes d’asiles politiques à l’OFPRA, des témoignages, qui sont restés gravé en moi.
Qu’est-ce qui vous a poussé à la réalisation ?
Une discrimination que je subis au quotidien dans mon métier d’acteur. Je suis confronté à des rôles clichés calqués sur mes origines : Vendeur de roses, vendeur de marron, parler avec un accent indien…
Au lieu d’attendre qu’un réalisateur prenne les devants, je fonce, je me mets en scène en espérant changer la perception qu’ont les gens de la communauté indienne et sri-lankaise.
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre expérience d’acteur-réalisateur d’un même film ? Est-ce une expérience que vous pensez renouveler ?
L’acting est mon moteur, c’est ce qui me pousse à écrire et à réaliser. C’était une superbe expérience, mais très intense… Trois mois avant le tournage, j’avais commencé à travailler mon personnage avec l’aide d’une coach artistique et d’un coach sportif. On avait fait une grande préparation avec le chef opérateur et la scripte dans le but d’aller tous dans la même direction, de tous voir le même film. Sur le tournage, j’avais un ami comédien qui était le consultant artistique, il était là pour me faire des retours sur mon jeu. J’ai pris un plaisir fou à être au cœur-même de la création, je pouvais dirigeais mes comédiens à travers le jeu. La plupart d’entre eux étaient des comédiens non professionnels, ils étaient rassurés de m’avoir avec eux.
Le fait de jouer dans mon film n’a pas été facile, je l’admets. C’est de l’endurance, mais je ne conçois pas l’un sans l’autre. Jouer dans mes films, c’est ma force, et je souhaite la cultiver.
Pouvez-vous nous parler de vos futurs projets de réalisation ?
Je prépare mon prochain court métrage, The Loyal Man, une romance dans la mafia Tamoul de Paris entre un homme de main et une clandestine. En parallèle, je développe mon premier long métrage, EELAM, qui sera un film d’infiltration dans les gangs Tamouls de Paris.
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées en particulier ?
Pas spécialement. Au contraire, je trouve ce format particulièrement difficile. Mon sujet était trop dense pour un court métrage. À l’écriture, c’était un casse-tête de « tout faire rentrer ».
Si vous êtes déjà venu, racontez-nous une anecdote vécue au Festival de Clermont-Ferrand ? Sinon, qu’en attendez-vous ?
Ça sera une première pour moi, donc je ne sais pas trop. J’espère que ça va bien se passer.
Autres diffusions publiques ?
Le film a été acheté par CANAL +. Il y aura une diffusion en mars, mais je n’ai pas encore la date précise.
Pour voir Little Jaffna, rendez-vous aux séances de la compétition nationale F9.