Lunch avec Mad Mieter (Mad Locataire)
Entretien avec le duo M+M (Marc Weis et Martin De Mattia), coréalisateurs de Mad Mieter (Mad Locataire)
Les mantes religieuses sont-elles des animations numériques ? Si non, comment vous y êtes-vous pris pour diriger leur jeu dans la « maison de poupées » ?
C’étaient de vraies mantes religieuses, bien vivantes. Notre film suivait un scénario ouvert avec toutes sortes de scènes. Il faisait une chaleur infernale dans le studio. Mais c’est un énorme avantage quand on tourne avec des mantes religieuses, parce que ça leur donne un comportement beaucoup plus vif. Lorsqu’il fait plus frais, les mantes ont tendance à passer des heures entières sans bouger du tout. Comme les insectes ne réagissent pas aux indications de mise en scène, on a dû faire de nombreuses prises jusqu’à ce qu’elles agissent à peu près comme on le souhaitait. Enfin, on a élaboré le récit au moment du montage, ce qui nous a pris plusieurs semaines.
Quelle est l’importance de l’environnement « naturel » de vos mantes religieuses ? Est-ce qu’un autre environnement aurait rendu leurs interactions différentes ?
Oui, le vieil appartement est une sorte de troisième actrice. Il a son propre caractère sonore ou, si l’on peut dire, sa propre voix. On peut percevoir les bruits de l’extérieur à travers les murs, comme les voisins ou une route qui passe tout près, par exemple. Mais pour autant nous ne voulions pas que ces sons soient trop « humains », sinon les mantes auraient fait trop étranges dans l’appartement. Ainsi, nature et culture fusionnent concrètement. Dans notre imaginaire, la mante religieuse adopte une taille et un comportement humains. C’est une locataire qui semble souffrir de solitude ; elle est étrange, et soucieuse de défendre sa maison contre les intrus. Peut-être qu’elle ressent les mêmes choses que nous ? Est-elle douée d’un sens moral ?
Pourquoi avoir choisi cet animal en particulier ?
La mante religieuse vit et aime en suivant ses instincts. Elle semble étrangement autre et en même temps elle a quelque chose d’anthropomorphique. Ses mouvements, la manière dont elle tourne la tête, déplace ses membres, sa posture proche de la station debout, commémorent le comportement humain. Cette hybridité est sans doute ce qui nous fascinait le plus – tout comme elle fascinait les surréalistes d’ailleurs.
Pouvez-vous nous parler des mouvements de caméras dans votre film ? Comment vous y êtes-vous pris ?
On pouvait démonter chacun des murs de la maquette, ce qui nous permettait de multiplier les positions et points de vue avec la caméra macro 3D. Notre chef opérateur, Sébastien Cramer, utilisait un slider spécial sur rails courts pour les travellings. Cela lui permettait de faire des mouvements motorisés très lents et contrôlés. La plupart des pièces de la maquette n’avaient pas de plafond, ce qui fait qu’en plus des éclairages miniatures de la maquette, nous pouvions éclairer les scènes par au-dessus avec des éclairages de cinéma. En revanche, nos protagonistes en ont profité pour tenter de s’évader à de nombreuses reprises. Elles n’arrêtaient pas de grimper aux murs à une vitesse inouïe pour essayer d’atteindre les lumières… 🙁
Quel est l’avenir du format court métrage d’après vous ?
Les courts métrages peuvent gagner du terrain dans les musées. Ils peuvent apporter de la profondeur aux réseaux sociaux. On peut en faire des séries de courts métrages. Peut-être qu’on reviendra un jour à la bonne vieille tradition de projeter des courts en début de séance au cinéma, avant le film à l’affiche… !?
Demain on reconfine, quels plaisirs culturels conseillez-vous pour échapper à l’ennui ?
Eh bien, par exemple, associer vin rouge (français), le Nosferatu de Murnau, des chocolats et des rideaux qui ondoient dans le vent ?
Mad Mieter (Mad Locataire) est présenté en compétition labo L1.