Breakfast avec Mars Colony
Entretien avec Noël Fuzellier, réalisateur de Mars Colony
D’où vous est venue l’inspiration pour le personnage de Logan ?
Lors d’un stage de jeu face à la caméra que j’ai donné il y a quelques années, j’ai rencontré un ado très dissipé, très bruyant, parfois rigolo et souvent agressif. Il n’était à l’écoute de personne et ne semblait être là que pour parasiter le cours. Il avait une violence inouïe en lui qui me rendait dingue. Le genre d’élève/stagiaire qui pourrit toute la classe et que tu n’arrêtes pas d’envoyer dans le couloir pour qu’il se calme. Puis au fur et à mesure de la semaine de stage, j’ai découvert que derrière cette attitude à la fois rebelle et immature se cachait un garçon d’une sensibilité folle qui faisait ressortir ses sentiments avec une violence à la fois physique et verbale. Comme le Logan de mon film, cet ado ne pouvait faire ressortir des sentiments que dans des moments très intenses qui lui faisait péter les plombs. Bref. Derrière les apparences, j’ai découvert un ado brisé qui avait surtout besoin d’attention. J’avais déjà en tête le scénario de Mars Colony et je me suis dit que j’avais besoin d’un personnage comme ça pour que le spectateur adhère vraiment à l’histoire. J’avais besoin d’un anti-héros qui change radicalement et qui se livre totalement au spectateur pour que celui-ci change avec lui.
Quel intérêt portez-vous pour la planète Mars et les voyages dans l’espace ?
C’est plus l’idée des voyages qui m’intrigue. Les voyages vers l’inconnu. Il y a le rêve de Logan d’aller sur Mars mais il y a aussi le voyage dans le temps de CT-LT. Ce sont des éléments narratifs qui sont présents dans quasiment tous mes films de références et qui ont une choses en commun : le fait d’emmener les spectateurs dans des aventures hors du commun où ils peuvent se permettre de rêver à nouveau. Les voyages dans l’espace, les mystères de l’Univers, les rencontres extraterrestres. Je suis fasciné par tout ce qui nous rappelle que nous sommes juste un micro grain de sable perdu dans l’espace. Nous ne sommes pas grand chose et tout reste à découvrir. Et j’aimerais faire de tout ça des films d’aventure humanistes et généreux.
Quelles sont vos œuvres de référence ?
Joe Dante, James Cameron, Robert Zemeckis, John Carpenter, George Miller, Steven Spielberg, Wolfgang Petersen… Ce sont les réalisateurs qui m’ont fait découvrir le cinéma. Ils ont fait les films avec lesquels j’ai grandi. Des œuvres qui vont du film d’aventure pour enfants au film d’horreur. Mais tous ces réalisateurs ont en commun cette envie de faire vivre aux spectateurs des histoires extraordinaires. Des histoires qui les sortent de leur quotidien et qui leur permettent de s’échapper pendant une heure et demi. À côté de ça, ma deuxième grande passion, c’est le films sur l’adolescence. John Hughes, Judd Apatow et tous les auteurs qui gravitent autour d’eux. L’adolescence est la période la plus compliquée de la vie et je trouve que ces auteurs ont réussi à en capter toutes les subtilités.
Parlez-nous un peu de votre expérience en tant que réalisateur et de ce qui vous a poussé dans cette voie ?
Au bout de quatre courts métrages, j’ai la sensation de commencer à comprendre comment marche une histoire. Je pense être encore loin de maitriser l’art du scénario mais j’apprends de film en film. Et plus je réalise de films, plus je m’approche de la forme d’histoires que je veux raconter et plus j’assume mes références cinématographiques. Retour vers le futur, Enemy Mine, Explorers, Terminator, Starman, The Thing, Mad Max… J’ai grandi avec ces films, ils faisaient parti, eux, de mon quotidien. Puis, quand j’ai eu 8 ans, mes parents m’ont emmené au cinéma voir Total Recall. Et quelques temps après, toujours au cinéma, Terminator 2. Je n’avais rien vu d’aussi fou et j’ai su que je voulais faire des films. Et Schwarzenegger est devenu mon idole. Paul Verhoeven et James Cameron m’ont ouvert les yeux sur la magie du cinéma et sur la science fiction et je n’ai plus pu m’en passer.
Comment s’est déroulé le casting ?
Philippe Rebbot avait déjà tourné dans mes deux courts métrages précédents. C’est une personne extraordinaire et un acteur bluffant. Il est toujours drôle, dur et touchant. Je savais qu’il apporterait au film la tendresse et l’humour dont a besoin Logan. Le regard qu’il porte sur lui dans le film est déchirant, plein d’humanité. J’ai donc écrit le rôle en pensant à lui. Mais bien sûr, le vrai enjeu était de trouver l’adolescent pour interpréter Logan. Et je savais que, pour des raisons de ressemblance, si j’avais trouvé un ado qui ne ressemblait pas du tout à Philippe, j’aurais dû renoncer à lui… Mais la chance et, surtout, Sophie Lainé Diodovic, la directrice de casting qui a rencontré un nombre incalculable d’ados, m’ont fait découvrir Théo Van de Voorde. Et Théo, même s’il n’est pas du tout comme Logan dans la vie, s’est révélé être une évidence. Comme Philippe, il a un regard doux sur les gens et j’ai tout de suite vu en lui la manière dont Logan doit changer tout au long du film. Et il le fait de manière brillante. Théo porte le film de bout en bout avec son énergie et sa fougue adolescente. Il a une force de volonté et une capacité de travail extraordinaire qui lui permettent de toujours atteindre son objectif. J’ai eu beaucoup de chance…
Quels sont vos futurs projets cinématographiques ?
Je suis en écriture d’une série adaptée de Mars Colony et d’un long métrage de science fiction. Et dans les deux cas je traiterai encore d’une relation « père-fils » inhabituelle sur fond de film d’aventure.
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées en particulier ?
Pour une fois, c’est le format moyen qui m’a apporté des libertés. Le film dure 35 minutes, ce qui m’a permis de développer une histoire plus riche. Chaque histoire a sa durée et celle-ci ne pouvait pas se raconter de manière plus courte. Le fait que mes producteurs, Philippe Wendling et Marine Lepaulmier (Les Films Norfolk), me fassent confiance pour faire un film aussi long m’a permis de jouer avec la narration, d’emmener le spectateur dans cette aventure et d’essayer de raconter une certain nombre d’émotions. Puis, heureusement qu’il y a encore des festivals comme Clermont-Ferrand pour sélectionner des films de cette durée pour les partager avec le public.
Pour voir Mars Colony, rendez-vous aux séances de la compétition nationale F3.