Breakfast avec The Nest (Le nid)
Entretien avec Jamie Jones, réalisateur de The Nest (Le nid)
Qu’est-ce qui vous a poussé à aborder le sujet de la crise du logement et de la précarité à Londres ?
Différentes raisons, en fait. La presse en parle tout le temps. Les gens en parlent beaucoup, mais l’idée m’est surtout venue de conversations avec ma mère. J’ai grandi à Londres dans les années 1980 et mes parents vivaient dans des squats, j’ai donc passé une grande partie de mon enfance à déménager et à voir ma mère aux prises avec les huissiers. Je voulais évoquer mon passé et le comparer au présent. J’ai collecté de nombreuses anecdotes auprès de ma mère, puis je les ai transposées à notre époque et compilées en une seule matinée tragique.
Pouvez-vous nous parler des images d’archives que l’on voit au début et à la fin du film, et du choix de la bande-son ?
Bien que toutes ces choses soient arrivées à ma famille, j’avais peur que les spectateurs pensent que j’exagérais un peu, que les choses ne se passent jamais de façon si impitoyable. Alors, durant la phase d’écriture, j’ai passé beaucoup de temps à lire des témoignages et à regarder des vidéos d’expulsions sur YouTube. C’est affolant le nombre de vidéos qu’on trouve en ligne et à vrai dire, on y voit des choses bien plus violentes que ce que je montre dans The Nest. Pendant le montage, Shelley (ma sœur, productrice du film) et moi avons estimé que pour bien montrer aux gens que ce sont des choses qui arrivent dans la réalité, le meilleur moyen était d’inclure des images de faits réels.
Pour la bande-son, je voulais imiter les chansons engagées des années 1960. Grâce à notre étroite collaboration, mon ami Javier Calequi, un compositeur bourré de talent, a créé cette fabuleuse bande-son originale.
Comment s’est passé le casting ?
De façon très conventionnelle, en fait. Nous sommes passés par une agence pour les rôles principaux, mais les contraintes budgétaires ont fait que nous avons dû nous débrouiller tous seuls pour les rôles secondaires. À partir du moment où Vicky a accepté le rôle principal, tout s’est accéléré. On avait juste envoyé le scénario à son agente, qui le lui a fait passer et elle a dit oui. C’était super de bosser avec Vicky car ça m’a forcé à placer la barre plus haut.
D’où vient votre intérêt pour le cinéma ? Avez-vous envie de rester dans le court métrage ou de vous orienter vers le long ?
Je m’intéresse au cinéma depuis ma plus tendre enfance. Mon père est un inconditionnel de Charlie Chaplin et il m’a transmis cette obsession. J’ai toujours été fasciné par le parcours de Chaplin et tout vient de là, j’imagine. J’adore faire des courts métrages. Ce qui est génial dans le court métrage, c’est qu’on peut faire des expériences car on ne les fait pas pour gagner des sous. Ce qui est moins bien, c’est qu’on ne gagne pas de sous. Je n’ai jamais réussi à obtenir de financements publics pour mes courts métrages, donc depuis toutes ces années, c’est juste un loisir très onéreux. À vrai dire, je commence à me sentir un peu coupable de demander sans arrêt à mes amis de travailler pour moi gratis. En fait, si je n’arrive pas à obtenir des subventions pour pouvoir rémunérer mon équipe correctement à l’avenir, le court métrage, c’est fini pour moi. Mais j’ai réalisé mon premier long métrage en septembre et il a très bien marché, donc j’espère gagner ma vie comme ça. On verra bien.
Quels ont été vos coups de cœur au cinéma l’an dernier ?
J’ai vu American Honey et j’ai adoré. Je trouve qu’Andrea Arnold est une pure légende. Il n’y a pas assez de femmes qui réalisent des films et elle est la preuve vivante qu’il faut que cela change. J’ai remarqué que plus je me consacre à la réalisation de films, moins je m’enthousiasme pour les films que je vois. C’est sans doute parce que j’en vois de plus en plus les ficelles ; mais quand je regarde les films d’Andrea Arnold, je retombe en enfance. Je ne vois pas les ficelles, je ne vois pas le scénario, je suis entièrement plongé dans le film, du début à la fin. Je pense que c’est parce qu’elle a un grand respect pour le jeu d’acteur, elle n’essaye pas de maîtriser chaque petit détail. Au lieu de cela, elle laisse les acteurs faire leur boulot, elle les filme à fond puis elle fait ressortir les nuances au montage. Je sais qu’il y a des passages gnangnans à la « Petite Sirène » dans ce film, mais je m’en fiche. J’adore aussi Robbie Ryan, je pourrais passer mes journées à regarder ce qu’il fait.
Si vous êtes déjà venu à Clermont-Ferrand, pouvez-vous nous raconter une anecdote sur le festival ? Sinon, quelles sont vos attentes pour cette édition ?
Je ne suis jamais venu, mais j’espère boire du bon vin français, voir des tas de super films et profiter de quelques jours de liberté où je pourrai oublier que je suis papa et me prendre pour un cinéaste.
D’autres projections de prévues ?
Pour l’instant, nous avons été sélectionnés dans les festivals suivants (nous attendons d’autres réponses) :
– Liverpool International Film Festival (nous avons obtenu le prix « Women In Film »)
– London Short Film Festival (nominé dans la catégorie « Meilleure photographie »)
– Festival international du court métrage de Clermont-Ferrand
– Tampere Film Festival
Est-ce que vous participerez à d’autres événements pendant le festival de Clermont-Ferrand (Expressos, conférences ou autre) ?
Je vais rencontrer les gens du British Film Council mais c’est tout pour l’instant.
Pour voir The Nest, rendez-vous aux séances de la compétition internationale I12.