Lunch avec Toprak
Entretien avec Onur Yagiz, réalisateur de Toprak
Comment avez-vous eu l’idée de cette situation où l’enfant se trouve porteur d’une responsabilité qui le dépasse ?
C’est une situation similaire à une situation dans laquelle je me suis retrouvé moi-même dans mon enfance. Puisque j’étais l’aîné de la famille et que mes parents ne parlaient pas français, j’étais leur interprète. On m’a souvent dit que parler deux langues était une chance, j’ai voulu témoigner du fait que ce n’est pas toujours le cas.
Comment avez-vous trouvé les comédiens ?
Je ne fais pas vraiment de casting à proprement parler, je choisis mes comédiens au feeling, ça se fait naturellement. En revanche, ça a été très difficile de trouver un enfant qui parle couramment et correctement le français et le turc. Généralement, les enfants issus de l’immigration ne maîtrisent pas assez bien la langue de leurs origines.
Pourquoi avoir utilisé le noir et le blanc pour la deuxième scène de Toprak ?
C’est un film que j’ai pensé comme l’échographie d’un enfant bilingue de 8 ans qui est sur le point de passer d’un âge à un autre deux fois plus vite parce qu’il a deux langues maternelles : celle qu’il a apprise dans le ventre de sa mère et celle apprise à la maternelle. C’est aussi l’échographie d’une famille dont les membres sont liés les uns aux autres et qui ne forment qu’un corps. Pendant la séquence d’échographie que vous évoquez par exemple, le docteur procède à l’échographie des bébés tandis que le montage opère celui de la famille Öztürk. En bref, mes choix esthétiques découlent de ma volonté de synchroniser la forme avec le fond. Comme une échographie, mon film est en 4/3 et en noir et blanc.
Qu’est-ce qui vous intéressait dans les relations entre les membres de cette famille à l’approche d’un accouchement ?
Ce qui m’intéresse, c’est de dire que l’amour est le cordon qui lie l’enfant à ses parents.
Envisagez-vous de réaliser d’autres films où il est question de la sensibilité de l’exercice de traduction ?
Étant un enfant issu de l’immigration, la traduction a toujours été au cœur de mon existence et je pense que mes films en témoigneront toujours.
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées en particulier ?
Contrairement au long métrage où les enjeux financiers sont plus importants, je pense que le court métrage est un espace où on se sent plus libre d’exprimer une vision intime du monde.
Si vous êtes déjà venu, racontez-nous une anecdote vécue au Festival de Clermont-Ferrand ?
Sinon, qu’en attendez-vous ?
C’est ma première sélection au festival de Clermont-Ferrand et je me réjouis du fait que mon film sera diffusé devant un grand nombre de spectateurs. Les films n’existent que lorsqu’ils sont vus, donc c’est avec joie que je viendrai présenter mon film.
Pour voir Toprak, rendez-vous aux séances de la compétition nationale F1.