Dernier verre avec Ce qui nous éloigne
Interview de Wei Hu, réalisateur de Ce qui nous éloigne
Comment avez-vous eu l’idée de décrire une relation aussi fusionnelle que celle de Ce qui nous éloigne ?
Je laisse une grande part à l’instinct et à ma propre sensibilité dans le choix de mes sujets. La particularité du cinéma, c’est l’accès possible à une promiscuité de l’être. C’est là où le réel et le fantasme se croisent et se complètent. Dans la vie, nous n’avons pas forcément l’occasion d’observer à ce point les relations entre les gens ou de détailler leur manière de communiquer. Le cinéma permet de rentrer au plus près de l’intime et c’est ce qui est essentiel et important à mes yeux.
Comment vous est venue l’idée de les placer dans ce séminaire « conscience de soi » ?
Ici, j’ai volontairement voulu que l’action se déroule à la fin du séjour en France des parents biologiques de Camille. On suppose que Camille, tout comme ses parents, a imaginé de multiples scenarii de retrouvailles où toutes les émotions se mélangent. On imagine que ce paroxysme émotionnel a déjà eu lieu, lors de leur première rencontre, leur premier dîner, les premières réponses données aux premières questions qu’ils se sont posées naturellement. Là où nous prenons l’histoire, toutes ces scènes sont déjà passées. Nous sommes dans un temps de préparation au départ. Les personnages partagent un énième moment ensemble. Tous ces éléments de départ tendent vers cet état de “conscience de soi”, rendant la rencontre de ces deux cultures plus intime.
Vous explorez la frontière entre indépendance et égoïsme, émancipation et reniement, coupure et abandon. Pourquoi ces frontières vous intéressaient-elles ?
Dans ma vie, j’explore au quotidien la frontière entre la culture chinoise, celle de mes origines et celle française que je connais depuis que je vis ici. Mon expression artistique est indissociable de cette prérogative. C’est ce qui nourrit mon travail et mon désir d’explorer différentes frontières, quelles qu’elles soient.
Vous questionnez aussi l’impact de certains choix sur la vie d’un individu. Pourquoi étiez-vous intéressé par ces moments « charnières » ? Et avez-vous imaginé l’après de vos protagonistes ?
J’aime imaginer un court métrage comme le fragment d’une vie, sans réel début ni fin, mais qui amène à s’en inventer l’avant et l’après. Comme une allégorie de la vie, à l’image des écrits de Raymond Caver dont les histoires dévoilent toujours une émotion merveilleuse mais qui se termine avant même d’avoir pu commencer et qui laisse seulement une fascination qui s’attarde avec, comme seul outil, le pouvoir de l’imagination.
Quels ont été vos coups de cœur au cinéma cette année ?
Mon film coup de cœur de l’année est un film ancien, que j’avais déjà vu, La maman et la putain d’Eustache.
Si vous êtes déjà venu(e)(s), racontez-nous une anecdote vécue au Festival de Clermont-Ferrand ? Sinon, qu’en attendez-vous ?
Il ne peut pas y avoir de meilleure anecdote que le fait d’avoir obtenu le Grand Prix pour mon premier film La lampe au beurre de yak en 2013. Cela restera toujours un souvenir particulier pour moi.
Pour voir Ce qui nous éloigne, rendez-vous aux séances de la compétition nationale F7.