Dernier verre avec Die Tinte Trocknet Nicht (L’encre ne sèche pas)
Entretien avec Felix Herrmann, réalisateur de Die Tinte Trocknet Nicht (L’encre ne sèche pas)
Pouvez-vous nous parler du titre et du proverbe qui apparaît en début de film ?
Le proverbe du début, « les plumes sont levées, l’encre a séché », évoque la fatalité, l’idée que notre histoire à chacun est déjà écrite. Le titre « L’encre ne sèche pas » est une contradiction qui sous-entend que tout est fluide. J’aime ces deux idées, la fatalité peut avoir quelque chose de libérateur, elle peut nous dédouaner de notre responsabilité. Mais c’est ambigu, et c’est ce qui me plaît le plus.
Comment avez-vous eu l’idée de la relation entre ces deux femmes ? Sont-elles inspirées par des personnes que vous connaissez ?
C’est un mélange. J’ai une amie qui leur ressemble un peu. Elle est pratiquante et moderne à la fois – l’un n’a jamais empêché l’autre, mais les gens y voient une contradiction, et c’est pour ça qu’elles doivent faire preuve de répartie. Puis j’ai fait des recherches et rencontré d’autres femmes musulmanes. De plus, mes deux actrices, Süheyla et Amelle, ont toutes deux apporté leur vécu personnel aux personnages. Je me suis également basé sur les amitiés très fortes que j’ai connues (une ou deux dans ma vie) dans lesquelles on partage un idéal de vie commun.
D’où vient le passage en rap ?
L’idée vient entièrement d’Amelle Schwerk, notre actrice. Elle m’a dit qu’elle allait écrire un rap dans le style de Kate Tempest. J’ai dit d’accord. Et elle l’a fait en quelques jours, pendant le tournage. J’ai été bluffé par la qualité. Et c’est un peu comme si la jeune fille du film prenait le rôle du narrateur et racontait l’histoire avec ses mots à elle.
Parlez-nous de vos choix stylistiques : le noir et blanc, les plans coupés, etc…
On a eu l’idée du noir et blanc parce que le film est basé sur les contrastes. Quelque part, c’est l’idée qui sous-tend chaque scène. Les différentes tailles de plans et les coupes de plans viennent du fait que l’histoire est racontée de façon elliptique, fragmentée dans un sens, nous avons donc décidé de lui donner une forme fragmentée.
Que souhaitez-vous que le public en retire ?
Je souhaite montrer que ces jeunes femmes arrivent à gérer les situations de façon très originale. Et que les contradictions, loin d’être problématiques, peuvent au contraire stimuler l’imagination.
Quelles sont les œuvres ou les films qui vous ont inspiré ?
Bien sûr, Pasolini et Fassbinder. Et pour l’amitié, j’ai une référence moins intellectuelle, L’amie prodigieuse, d’Elena Ferrante.
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées en particulier ?
Sans aucun doute. La nature du court métrage, c’est de faire des expériences, d’une manière ou d’une autre. Les courts métrages que je vois ne manquent jamais de me surprendre. Ils sont tous différents, c’est extra.
Pour voir Die Tinte Trocknet Nicht (L’encre ne sèche pas), rendez-vous aux séances du programme I14 de la compétition internationale.