Dîner avec Cockpera (Coqpéra)
Entretien avec Kata Gugić, réalisatrice de Cockpera (Coqpéra)
Votre court métrage fait un parallèle entre un combat de coqs présenté comme un opéra et le comportement humain. Pouvez-vous nous parler de cet aspect du film ?
Le film s’inspire d’une très courte fable, ce qui me permettait d’en transposer l’histoire à ma façon. Ce qui m’a intéressé au départ, c’est le ridicule de se faire prendre en flagrant délit d’excès de confiance et d’orgueil. L’idée de l’opéra est venue de suite car j’imaginais tout ça sous la forme d’un spectacle mis en scène, avec des gestes et une expressivité similaires, et une intensité émotionnelle dans le jeu. Les personnages de Cockpera sont animés par un degré très primaire de suffisance, de désir et de fierté, nichés dans leur poulailler, qu’ils prennent pour un show grandiose, dont ils seraient la star irrésistible, en quête d’applaudissements.
Parlez-nous de votre style d’animation ?
Le film est dessiné numériquement. J’ai délibérément laissé le trait brouillon car j’apprécie cet aspect vivant, organique. J’ai ainsi pu expérimenter un mouvement plus relâché du trait, en opposition au mouvement plus élaboré du personnage. Ceci m’a aussi permis d’aborder le dessin à ma manière et à m’amuser plus avec les détails dans chaque plan puisque je n’avais pas à me soucier de la précision ou du nettoyage. J’ai souvent l’impression que quand je nettoie mes dessins bruts, ils perdent beaucoup de leur charme. Enfin, en procédant de la sorte, l’étape du dessin est beaucoup plus agréable pour moi.
Les gallinacés sont dessinés avec une touche d’anthropomorphisme. Que souhaitiez-vous représenter ?
Les personnages avaient des comportements humains stupides, je les ai donc dotés d’attributs corporels humains stupides.
La partition de cet opéra est signée du compositeur Vjeran Šalamon. Comment avez-vous collaboré ?
C’est mon mentor Darko Bakliža, qui m’a recommandé Vjeran, dont je connaissais déjà le travail. On s’est très bien compris sur ce que j’imaginais pour le film et comment je voulais aborder la musique. La majorité de la musique a été composée sur la base d’une animatique très sommaire, car j’avais d’abord besoin d’une composition clairement structurée à partir de laquelle pouvoir ensuite faire des retouches. J’ai fait certaines parties de l’animation avant que les chanteurs n’enregistrent pour leur donner une meilleure idée de la nature de leur personnage. En fait, ils ont eu très peu de temps pour se préparer et ont improvisé directement. Je leur en reste à jamais reconnaissante.
Comment voyez-vous l’avenir du court métrage ?
Une plus grosse quantité avec une meilleure visibilité. La production de tout type de contenu vidéo va devenir plus rapide, plus accessible et toujours plus actualisée. Bien sûr les formes et la qualité de cette production vont varier, mais cela devrait donner lieu à un plus grand nombre de plateformes concurrentes, qui rendront le format court accessible à un public plus large en leur offrant la possibilité de trouver leur type de contenu préféré dans cette masse.
Demain, on reconfine, quels plaisirs culturels recommanderiez-vous pour soulager l’ennui ?
Ni plus ni moins que ce qui vous permet de garder votre santé mentale. Mais pour ne pas éluder la question, voici quelques courts d’animation que j’ai découverts et aimés cette année : Leaking Life de Shunsaku Hayashi (qui n’est pas encore en ligne), Lizard Ladder de Ted Wiggin, ou encore Just a Guy de Shoko Hara (également en sélection au festival cette année).
Cockpera (Coqpéra) est en compétition internationale dans le programme I2.