Breakfast avec Mars IV
Interview de Guillaume Rieu, réalisateur de Mars IV
Comment avez-vous eu l’idée de placer vos personnages dans un environnement extra-terrestre ? Avez-vous un regard particulier sur l’exploration spatiale ?
J’ai toujours été fasciné par la planète Mars, et en particulier pour son impact sur la science-fiction littéraire, de John Carter aux Chroniques martiennes, en passant par Total Recall. Du coup, plus qu’une représentation réaliste de l’exploration spatiale, c’est une version plus « poétique », en hommage à la littérature de science-fiction, que j’ai essayé de représenter. En dehors de ça, parler d’exploration spatiale et d’évasion sur d’autres planètes est assez tentant dans le climat politique terrestre actuel…
Pourquoi étiez-vous intéressé par le rapport à l’hallucination et aux capacités qu’a le cerveau humain de jongler entre mémoire du réel et imagination ?
C’est un sujet qui me tient à cœur, qui était également présent dans mes films précédents. J’aime l’idée de remettre en question la réalité, du moins ce que nous appelons la réalité. Nos rêves et nos hallucinations peuvent nous paraître réels sur le moment. De notre point de vue à cet instant, ils sont donc la réalité. Le cinéma est pour moi la forme d’art qui se rapproche le plus du rêve, c’est donc un médium que je lie à cette notion de réalité/non réalité.
Avez-vous entrepris des recherches sur les technologies employées réellement par les spationautes ? Avez-vous conçu votre “robonaut“ comme une forme d’intelligence artificielle ou une simple machine ?
J’ai effectivement entrepris des recherches, qui m’ont finalement plutôt servi à confirmer ce que j’avais déjà mis par écrit. Entre autres, sur le nombre de personnes qui seraient envoyées, sur leurs compétences, le fait que ce soit des couples, etc. Pour le « robonaut », après avoir vu Interstellar et l’énorme robot rectangulaire qui semble tellement inadapté à l’intérieur confiné d’une station spatiale, je me suis dit qu’en toute logique, si on devait utiliser des robots dans l’espace, dans des vaisseaux optimisés pour des humains, la forme la plus adaptée serait une forme humanoïde. Et j’ai découvert à ma grande surprise que la nasa utilisait déjà des robots, et qu’ils sont de forme humanoïdes (le programme Robonaut). Du coup, j’ai orienté mon robot vers une version plus aboutie d’un Robonaut, qui serait une machine autonome, et non un robot radioguidé comme c’est le cas actuellement. Donc pour moi il n’a pas de conscience, c’est juste une machine programmée pour analyser une situation, et agir de la manière qui lui semble la plus adaptée pour aider l’humanité. Mais je crois que plus on insiste sur le fait qu’un robot n’a pas de conscience, plus le spectateur a envie de croire qu’il en a une…
Quelles techniques et quels outils avez-vous utilisés, en particulier quels effets de post-production, pour réaliser Mars IV ?
Tous les effets de postproduction ont été réalisé avec After Effects, il n’y a pas d’images de synthèses à proprement parler, à part certains éléments de réalité virtuelle qui sont animés en 3D rudimentaire. Pour les extérieurs de Mars, les paysages sont des matte paintings, quelques effets sont en animation 2D, il y a également du stop-motion, quelques maquettes, des effets d’explosion et de poussière provenant de banques d’images… Plutôt des effets traditionnels, globalement.
Pensez-vous que l’on puisse définir une frontière entre la technologie qui nous assiste de manière utile et celle qui mène à une perte de capacités à trouver les réponses par soi-même ?
Elle est plutôt floue, je pense que plus l’objet est utile à une tâche, plus il atrophie notre capacité à accomplir la tâche en question. Un GPS va nous mener plus rapidement à destination, au détriment de notre sens de l’orientation. Plus besoin de réfléchir, de mémoriser le trajet, de s’orienter. Le cerveau s’habitue à la fainéantise.
Quels ont été vos coups de cœur au cinéma cette année ?
The Nice Guys, Kubo, Dernier train pour Busan… Il n’y a pas grand chose d’autre qui me vient alors je rajoute Mad Max Fury Road, même si c’était 2015.
Si vous êtes déjà venu, racontez-nous une anecdote vécue au Festival de Clermont-Ferrand ? Sinon, qu’en attendez-vous ?
Je suis déjà venu présenter mes deux films précédents, L’attaque du monstre géant suceur de cerveaux de l’espace et Tarim le brave contre les Mille et Un Effets (« Prix du rire Fernand Raynaud » en 2015). À chaque fois, je me gèle les doigts de pieds, je mange de la truffade, du parmesan au Marché du film, et je bois des coups partout. J’espère que ce sera encore le cas cette année ! Ah et les festivaliers qui m’y croiseront le 5 février auront la chance de pouvoir me souhaiter mon anniversaire ! Cadeaux et gâteaux sont les bienvenus !
Pour voir Mars IV, rendez-vous aux séances de la compétition nationale F2 ou bien du programme Canal+.