Goûter avec Ursinho (Nounours)
Entretien avec Stéphane Olijnyk, réalisateur de Ursinho (Nounours)
Pourquoi vous avez choisi de tourner votre film à Rio ?
Parce qu’il fait chaud à Rio… 😉
Au commencement, je voulais faire le film en France sur une trame tournant autour d’un couple mal assorti. Je n’aurais jamais eu l’intention de situer mon film à Rio si je n’avais entendu les histoires d’amis gay se rendant régulièrement là-bas en vacances. Je me suis dit qu’il y avait peut-être quelque chose à faire dans ce pays dont je ne connaissais rien. N’étant pas du tout satisfait de mon script et encore traumatisé par l’expérience tumultueuse de mon précédent court métrage Chasse à l’homme tourné en Auvergne, je me suis dit que j’avais besoin d’aller voir ailleurs. Une fois à Rio, c’était une évidence : Nounours deviendrait Ursinho.
Comment avez-vous imaginé le personnage de Nounours ?
Dès le départ, mon personnage principal était un être passif et massif attiré par un corps fin et sculpté. C’est ce contraste qui m’intéressait. J’avais, auparavant, écrit un autre scénario sur un gros et un maigre en référence au court métrage de Polanski, film qui m’a longtemps poursuivi. Ursinho est le prolongement de ce premier scénario. Je voulais que Nounours soit fort et pauvre à la fois. J’ai mis du temps avant d’en faire un homme de ménage. À la fois pour l’inscrire socialement et pour lui permettre de passer d’un lieu à un autre, de traverser des espaces sociaux différents.
Comment avez-vous trouvé le comédien principal ?
C’est Duda, la directrice du casting du film, qui m’a présenté Digão. Lors des premiers tests à Rio, il dégageait quelque chose de fort et de dense sans avoir à en faire des tonnes. Contrairement aux autres acteurs, comme Leandro Firmino (Zé Pequeno de La Cité de Dieu) ou Babu Santana, qui ont été castés pour le même rôle, il n’avait pas besoin de faire d’effort pour être le personnage. Il était Ursinho, même si on a eu très peur au début à cause de sa taille. Il mesure plus de 2 mètres.
Vous êtes-vous renseignés sur la situation des favelas et les difficultés que rencontrent ses habitants, pauvreté, promiscuité, pressions sociales… ?
Je n’ai pas cherché à me renseigner, juste à vivre les choses. J’ai vécu dans le logement qu’occupe Ursinho et son père. Tous les trajets qu’Ursinho effectue je les ai faits aussi. J’ai monté et descendu les mêmes marches. J’ai emprunté le bonde (le funiculaire qu’on voit à l’écran). J’ai également vécu chez l’habitant à Copacabana pour mieux saisir l’ambiance décadente de ces grands appartements luxueux et vieillots. Tout ce qu’on voit à l’écran est né de cette expérience sur le terrain, des rencontres que j’y ai faites. C’est la réalité qui m’a inspiré.
Et pourquoi Nounours ne pouvait-il pas avoir de mère ?
L’absence d’un personnage féminin, c’est l’absence de descendance. Il s’agit d’homosexualité masculine et je voulais renforcer cet étouffement, cet entre-soi tourné vers la recherche d’un plaisir stérile. Comme le disait Cronenberg, « l’homosexualité est une sexualité pure parce qu’elle n’est pas tournée vers la reproduction ».
Y a-t-il des libertés que le format court métrage vous a apportées en particulier ?
Je ne sais pas s’il y a plus de libertés que sur un long. N’ayant pas encore été confronté au long métrage. J’ai l’impression qu’il y a parfois autant de contraintes à cause d’un budget très serré. Sur les 11 jours de tournage, je n’ai pas soufflé une minute. Si j’avais obtenu des financements supplémentaires, je pense que j’aurai pris plus de liberté, plus de jours de tournage par exemple pour expérimenter et tester des choses.
Si vous êtes déjà venu, racontez-nous une anecdote vécue au Festival de Clermont-Ferrand ?
Sinon, qu’en attendez-vous ?
La dernière fois que je suis venu, c’était en février 1996 lorsque j’habitais Clermont-Ferrand. Des amis de Lyon étaient venus me rejoindre pour profiter du Festival. On était tous très excité. C’était notre premier festival. L’expérience a été si concluante qu’un de mes amis a fait un malaise devant un court métrage. Les images étaient trop « trash ». D’après mes souvenirs, c’était un personnage féminin très âgé qui arrachait le téton d’un jeune homme attaché sur un lit.
Pour voir Ursinho, rendez-vous aux séances de la compétition nationale F11.