45e compétition nationale
Sauve qui peut (la vie)
Bien que la fréquentation des salles obscures soit en baisse, une chose est sûre : la production française n’a jamais faibli. Avec 1 972 films inscrits cette année, nous retrouvons un niveau proche de celui du “monde d’avant”. L’occasion de vous laisser séduire par des personnages hauts en couleurs et des paysages lointains ou intérieurs : 56 destinations vous seront proposées dans le cadre de cette 45e compétition nationale.
Ouverte sur le monde, la production française nous offre 10 coproductions internationales mais aussi des collaborations avec des cinéastes étranger·e·s qui nous entraînent, pêle-mêle :
– sur les marchés de poissons tokyoïtes (Go Fishboy – 1)
– dans un cimetière kosovar surpeuplé (I Kemi Varros Baballare – 2)
– en voiture dans la banlieue de Boston (I Once Was Lost – 3)
– au beau milieu d’une réunion de copropriétaires en Chine (The Elevator – 4)
– dans les banlieues pavillonnaires d’Uberlândia au Brésil (Big Bang – 5)
– sur un bateau de pêcheurs quelque part dans la Manche (Les Silencieux – 6)
– dans un hôtel luxueux près de Bogota (Todo Incluido – 7)
– ou encore dans le bidonville d’Angeles City à Manille (Matapang – 8)
De circulations, il sera aussi beaucoup question : tandis que certains chercheront à cacher leurs soucis derrière des projets de grand départ au Canada (La Vie au Canada – 1), d’autres s’évaderont, en quête d’un fantasme estival comme Paul dans une station balnéaire méditerranéenne (Le Roi qui contemplait la mer– 2), ou bien pour tromper le vide et tenter de reconquérir un amour perdu comme Lili qui peine à rejoindre l’aéroport (Ville éternelle – 3).
Et il y a celles et ceux, nombreux, qui reviennent au bercail, par nostalgie, par confort ou par dépit et qui retrouvent, le temps d’un séjour, le réconfort d’une amitié impérissable malgré l’éloignement (Rien d’important – 4), la détresse d’un frère (Amarres – 5), ou la redécouverte d’un paysage froid que l’on pensait épuisé (La Grande Arche – 6).
Cette quête de sens est habitée par le deuil. La mort rôde en filigrane sur plusieurs films, pas forcément hostile, mais implacable et parfois libératrice.
Il y a cette jeune femme qui traverse la France pour récupérer les cendres de son père et sème ses poèmes comme autant de fleurs (Almost A Kiss -1) et l’adolescente qui se heurte aux coutumes religieuses entravant ses adieux (Sur la tombe de mon père – 2). Il y a la photographe qui révèle l’ectoplasme des absent·e·s sur l’écran numérique de son appareil photo (Derrière la nuit – 3) et celui qui, par un rituel étrange, parle à son frère mort par la voix d’un autre (S’il vous plaît arrêtez tous de disparaître – 4). Mais c’est Edwardo, un indomptable pêcheur, qui affrontera la Grande Faucheuse dans une danse endiablée (Sèt Lam – 5).
La sélection offre la part belle aux laissé·e·s pour compte et aux marginaux·ales : SDF, sans-papiers, invalides, incompris·e·s porteront haut et fort leur voix au chapitre. Dans un effet domino, comment ne pas voir les conséquences du doux vent de révolte qui pousse l’entrée en résistance de Chico du haut de sa petite taille (Big Bang – 1), convainc Quentin, handicapé moteur à pousser son auxiliaire et meilleur ami à partir (Auxiliaire – 2), s’empare de Gary, impuissant à conduire son fils Tom sur la route des vacances, composant avec leur surdité (Tom veut rentrer – 3), traverse l’odyssée d’Anne, jeune SDF un peu lunaire soumise aux dangers de la rue (Cloche petite aux merveilles du pays – 4) ou encore terrasse la jeune Rosie, immigrée congolaise en proie à deux laveurs de carreaux londoniens malhonnêtes (Lions – 5) ?
Tout ne sera pas sombre, rassurez-vous, les rencontres qui ponctuent ces cheminements se concluront souvent par des amitiés indéfectibles, des grandes histoires d’amour ou de simples flirts qui réchauffent l’âme.
Longtemps, ces instants fugaces vous hanteront, qu’il s’agisse de retrouvailles saugrenues dans un confessionnal (Pluie de grâce ou grâce à la pluie – 1), de l’apprentissage de la boxe pour s’émanciper (La Lutte est une fin – 2), d’une communauté sororale au sein d’un salon de coiffure (Anansi – 3), de l’abordage sauvage d’un pédalo de geeks par deux ados parisiennes en vacances (Un dernier été – 4) ou d’un carjacking impromptu (Tondex 2000 – 5).
Parmi ces retrouvailles, célébrons le retour de celles et ceux qui ont déjà fait les beaux jours du court et du festival, devant ou derrière la caméra. Les comédiens qui n’en sont plus à leur coup d’essai : Damien Bonnard (1), Bastien Bouillon (2), Samir Guesmi (3), Florence Janas (4), Martin Jauvat (5), Pauline Lorillard (6) ou encore Aloïse Sauvage (7).
Et les cinéastes que nous prenons beaucoup de plaisir à retrouver, qu’il s’agisse de leur deuxième ou quatrième film en compétition, parmi lesquels : Soufiane Adel, Zoel Aeschbacher, Osman Cerfon, Jean-Sébastien Chauvin, Vincent Fontano, Antoine Giorgini, Carlos Segundo, Maïté Sonnet ou Adriano Valerio.
Comme d’habitude, deux films représenteront la France dans la compétition internationale : Écorchée de Joachim Hérissé (1) et Des jeunes filles enterrent leur vie de Maïté Sonnet (2).
Deux regards posés sur des personnages féminins puissants : le premier est un conte sombre animé (première réalisation de ce cinéaste virtuose) aux tonalités edgar-poësques qui nous entraîne dans les cauchemars épouvantables de deux sœurs siamoises, dans lesquels les matières textiles qui constituent les marionnettes prennent littéralement chair.
Cette chair n’est pas toujours tendre chez Maïté Sonnet : elle vient gratter le vernis luxueux d’une station thermale montagnarde pour exposer les aspérités des vies pas si dorées d’un groupe de jeunes femmes réunies pour célébrer le bonheur à venir (vraiment ?) de l’une d’entre elles.
Parce que nous avons à cœur de favoriser les échanges entre les cinéastes et leur public, profitez des séances Micro pour aller à leur rencontre et discuter avec eux à l’issue de la projection. Vive le cinéma en salle !