[Éditorial] Compétition internationale 2018 : surprises, perles rares et nouveautés venues du monde entier
Plus qu’un tour du monde, c’est un portrait de celui-ci que nous offre la compétition internationale chaque année. Par ces temps de production réduits, le court métrage est certainement l’objet filmique qui se fait le plus rapidement témoin de notre temps. Les sujets qui questionnent nos sociétés s’incarnent dans les personnages que l’on découvre au fil des minutes, comme un écho universel dans l’intime. En 2018, 75 courts métrages nous promènent de continent en continent, entre fiction et réalité, premiers films et œuvres de cinéastes confirmés. Un arrêt dans l’Amérique post-Trump : à l’heure où Charles Manson vient de passer l’arme à gauche, Fry Day (Laura Moss) raconte l’histoire d’une jeune fille venue immortaliser pour quelques dollars des badauds rassemblés pour l’exécution d’un serial killer. Une société face à ses contradictions, à la fois horrifiée et fascinée par sa propre violence.
En Europe aussi, des échanges burlesques dans un parlement finlandais (Puheenvuor) aux immeubles délabrés d’une banlieue suisse (Bonobo), on montre le déclin de chacun en y trouvant pourtant de furtifs éclairs de poésie. Le regard des autres, mais aussi le regard que l’on porte sur soi, un autre sujet abordé par de nombreux films en compétition cette année.
Franchir les lignes bien tracées de modèles passéistes que pourtant certains s’acharnent à maintenir en vie, comme dans Counterfeit Kunkoo (Inde) qui suit le combat d’une femme divorcée pour louer un simple appartement. S’amuser des codes et des clichés avec humour, avec le regard corrosif porté sur l’image des mères de Kleptomami (Allemagne). Se découvrir, s’accepter ou lutter contre ses désirs, comme les adolescents de Sirene (Pays-Bas) ou d’Unnatural (États-Unis). Les gens, les lieux aussi, ceux où l’on vit et ceux qui nous habitent, ceux que l’on voudrait quitter jusqu’à en risquer sa vie. Si la crise migratoire hante de nombreux films depuis déjà quelques années, ils nous offrent un regard bien différent de nos journaux TV, des points de vue à hauteur d’homme – et parfois de chèvre (parce qu’il y a de quoi le devenir), comme dans Magic Alps (Italie).
Enfin, parce qu’il y a aussi des voyages que l’on fait sans y être contraint, pour le plaisir de la découverte de l’autre et d’ailleurs, la compétition internationale vous amènera des montagnes embrumées de Colombie aux narines enrhumées d’un jeune coréen, de la fuite d’un petit délinquant anglais à un étal marocain de DVD piratés, des chansons mélancoliques d’une ménagerie suédoise aux mixtapes d’adolescents au pays de l’oncle Sam.