Lunch avec On the Surface (En surface)
Entretien avec Fan Sissoko, réalisatrice de On the Surface (En surface)
Avez-vous toujours été attirée par l’animation ?
J’ai toujours aimé l’animation, déjà quand j’étais enfant, et encore maintenant que je suis adulte. C’est un processus magnifique et fascinant. Mais, je n’avais jamais réalisé de film d’animation avant On the Surface.
Votre film aborde des sujets sensibles comme l’immigration, le racisme ou la dépression post-partum, et pourtant, les couleurs, les paysages et les sons de la mer le rendent très calme. Diriez-vous que réaliser ce film était une expérience cathartique ?
Oui, absolument. J’ai réalisé ce film pour essayer de transformer des expériences douloureuses et confuses en quelque chose de beau. C’est un court métrage d’animation de fiction, mais il s’inspire très largement de mes expériences en tant que femme noire aux origines multiples et immigrée. Je suis née en France, d’un père malien et d’une mère française, et je vis désormais en Islande. Dans ce film, je parle du fait d’élever un enfant dans un pays qui n’a rien à voir avec votre pays natal. Il y a cette idée de transmettre un sentiment d’appartenance alors que vous avez vous-même le sentiment de n’être chez vous nulle part. Je me suis aussi inspirée de conversations que j’ai eues avec d’autres expatriés sur leur relation avec le paysage islandais, si beau, mais si dur. J’ai échangé avec une femme qui allait nager dans l’eau froide pour surmonter ses peurs et j’ai envisagé la nage comme une puissante métaphore pour évoquer le voyage émotionnel de mon personnage. Je voulais qu’on la voie s’opposer au paysage alors qu’elle plongeait dedans, même s’il ne lui est pas familier ou se révèle hostile. Le film montre aussi, tout simplement, que la nature guérit.
Pouvez-vous nous parler de votre technique d’animation ?
C’est de l’animation sur ordinateur en 2D. J’ai principalement composé chaque scène avec une image fixe dans Photoshop, puis animé chacun des éléments comme la mer, le corps ou le ciel, image par image. J’ai encore une grande marge de progression, mais j’ai trouvé le processus assez reposant. Pour les mouvements les plus complexes, je me suis aidée de vidéos que j’avais tournées. J’ai la chance de vivre au bord de l’océan et mes promenades m’ont servi de prétexte pour filmer les mouvements de l’eau.
Y a-t-il un court métrage qui vous a particulièrement marquée ?
C’est une question complexe. En termes d’animation, j’ai adoré Genius Loci d’Adrien Mérigeau, qui était nommé aux Oscars en 2021. Il est magnifique : l’animation est hypnotisante, c’est un véritable régal pour les yeux. C’est un court métrage que je pourrais regarder encore et encore, car sa forme de narration laisse de nombreux éléments ouverts à l’interprétation. En ce qui concerne les courts métrages live action, Hanging On de Alfie Barker est un documentaire très instructif qui raconte une histoire sérieuse avec des effets visuels magiques.
Selon vous, qu’est-ce qui fait un bon film ?
Pour moi, c’est un film compliqué à expliquer, un film qui vous immerge dans un autre monde et vous fait vous soucier de ses personnages sans pour autant en dire trop, mais aussi un film qui laisse des questions en suspens.
Pour voir On the Surface (En surface), rendez-vous aux séances de la compétition internationale I4.