Lunch avec Homeless Home
Entretien avec Alberto Vázquez, réalisateur de Homeless Home
Pourquoi avez-vous souhaité associer l’apparence de vos personnages à des figures mystiques célèbres (sorcière, fantôme, diable, etc.) ?
J’aimais l’idée de travailler avec des sorcières, des ogres, des orcs et des magiciens pour sonder les problèmes sociaux actuels, car bien que les protagonistes du film soient des monstres, leurs problèmes sont très humains : crise économique, dépopulation, dépendances, problèmes mentaux, vieillesse, etc. Je trouvais intéressant d’utiliser un imaginaire médiéval proche du monde de Tolkien comme métaphore pour parler de la réalité et du temps présent.
Comment avez-vous réalisé les arrière-plans ?
Eh bien, ils ont été créés numériquement, en imitant la peinture acrylique ou la peinture à l’huile. Certains sont basés sur des photographies ou des collages, d’autres non. Graphiquement, le court a une esthétique sombre et picturale, en noir et blanc, et ses personnages sont traités comme des silhouettes. Il y a une utilisation constante de plans larges et de paysages, c’est-à-dire de petits personnages évoluant dans de grands espaces. C’est un procédé stylistique que j’ai utilisé pour renforcer la solitude des protagonistes dans l’environnement dans lequel ils vivent.
Pour ce film, comment avez-vous décidé de traiter la question de la violence ordinaire et la façon dont celle-ci affecte les relations ?
Je voulais parler de la violence physique mais aussi de la violence émotionnelle car elles sont souvent liées. Les personnages sont assez violents, ils recourent aux brimades et l’un des protagonistes (l’ogre) est un agresseur physique et émotionnel. Disons que la désolation de l’endroit, le manque de perspectives économiques et l’environnement déprimant et pollué contaminent également les personnages de l’intérieur. Dans cette histoire, il y a un triangle amoureux entre une sorcière, un ogre et un orc. Ce type de conflit, typique des petites villes et villages, est le fil conducteur de l’histoire et mènera à une histoire d’amour et de jalousie.
Était-il important pour vous que les personnages expriment leurs sentiments et combien de temps vous a pris l’écriture des dialogues ?
Les dialogues sont très familiers et j’ai utilisé une façon de parler très moderne. Cela permet de créer un effet de contraste et d’apporter une touche d’originalité tout en rapprochant l’histoire du monde contemporain. Que les monstres soient en mesure de parler explicitement de leurs sentiments fait partie de l’humour de Homeless Home. Écrire les dialogues ne m’a pas pris longtemps car les personnages parlent comme mes amis et moi-même. C’était justement l’idée.
Allez-vous réutiliser l’univers de Homeless Home pour d’autres projets ?
Eh bien… peut-être, ça serait une possibilité mais, en ce moment, je me concentre sur mon prochain long métrage, Unicorn Wars, qui va m’occuper pendant au moins deux ans.
Quel est l’avenir du format court métrage d’après vous ?
Peut-être un changement dans sa distribution. Nous vivons aujourd’hui dans un monde où la vitesse et l’immédiateté prédominent et j’aime penser que cela pourrait favoriser le format court. Les plateformes numériques programment de plus en plus de courts métrages et c’est peut-être le début d’un âge d’or. Si les gens n’ont pas la patience de voir un long métrage « bizarre », peut-être qu’ils l’ont davantage pour un court métrage. C’est une réflexion très optimiste. Au final, et comme toujours, ce sont les festivals, l’aide publique et les efforts de ses créateurs et producteurs qui maintiendront l’industrie à flot.
Demain on reconfine, quels plaisirs culturels conseillez-vous pour échapper à l’ennui ?
Beaucoup de choses. Dans ce confinement, nous avons vu l’importance vitale de la culture. Beaucoup de gens qui ne travaillent pas dans le secteur culturel ont constaté que sans culture, une société manque d’intelligence, devient ignorante et est rongée par l’ennui. J’ai profité de l’occasion pour lire davantage et regarder beaucoup de grands classiques du cinéma. J’en ai également profité pour jouer d’un instrument de musique, méditer et faire beaucoup de sport. En résumé, prendre soin de mon corps et de mon esprit.
Pour voir Homeless Home rendez-vous aux séances L3 de la compétition labo.