Goûter avec Fabiu
Entretien avec Stefan Langthaler, réalisateur de Fabiu
Comment présenteriez-vous votre film à quelqu’un qui ne l’a pas encore vu ?
Fabiu parle du fait de vieillir et des désirs inassouvis. C’est l’histoire d’un vieil homme confronté à ses envies réprimées, jusqu’à ce qu’un jeune auxiliaire de vie débarque dans sa vie. Sous les yeux de sa femme, très malade, il a du mal à gérer ses sentiments. Entre souffrances et joies de vivres intenses, il va pouvoir se sentir jeune une dernière fois.
Pourquoi vous êtes-vous intéressé à ce sujet et à ces personnages ?
J’ai eu, pour la première fois, envie de réaliser un film sur un sujet personnel. Et d’une certaine manière, on peut dire que ce court métrage parle de mon coming out et du courage que cela m’a demandé. Il y a quelques années, j’ai fait un cauchemar dans lequel j’avais les traits d’un vieil homme. J’étais proche de la fin de ma vie et je comprenais que je ne pourrais jamais connaître le grand amour. Cette image était si intense, si terrifiante, qu’elle m’a fait l’effet d’un électrochoc et m’a convaincu que je devais changer de vie pour ne pas devenir ce vieil homme.
Comment êtes-vous parvenu à naviguer entre la mort et la fin de vie, qui sont deux sujets complexes ?
Depuis très longtemps, depuis mon enfance je dirais, je suis fasciné par la vieillesse. J’ai toujours été attiré par les grandes expériences de la vie que transmettent en silence les personnes âgées et qu’elles révèlent par leur regard. Leurs yeux, qui savent déjà ce que le futur réserve, sont remplis de beauté. Et bien sûr, l’élément décisif a été le dévouement de Günter Tolar, notre acteur principal, qui s’est inspiré de ses expériences personnelles pour mieux incarner le personnage. Il a donné vie au personnage d’Arthur et lui a donné toute sa dignité.
Que cherchiez-vous à explorer dans la relation entre Arthur et le jeune auxiliaire de vie ?
Je pense qu’un rapport de force intéressant s’installe entre eux. Le pouvoir d’Arthur réside dans sa position sociale et l’argent. Celui de Fabiu réside dans sa jeunesse et sa beauté. Ce qui est formidable c’est qu’ils se sentent tous les deux inférieurs à l’autre pour une raison différente et ne réalisent pas ce que l’autre ressent. Mais tout n’est pas une question de pouvoir. Souvent, j’ai le sentiment que les êtres humains sont séparés les uns des autres par une distance douloureuse et insurmontable, que nous désirons tous supprimer à un moment ou à un autre.
Quel est l’avenir du format court métrage d’après vous ?
C’est une question complexe. Personnellement, je considère encore les courts métrages comme des exercices pratiques en vue de réaliser des longs métrages. Tant qu’ils ne permettront pas de gagner sa vie, ils resteront de véritables tremplins. Mais il est évident que l’engouement autour des courts métrages lors des festivals ou sur les plateformes de streaming ne cesse de grandir. Cela va peut-être ouvrir des opportunités, d’ailleurs les habitudes des spectateurs sont déjà en train de changer.
Demain on reconfine, quels plaisirs culturels conseillez-vous pour échapper à l’ennui ?
Peut-être quelques-unes de mes sources d’inspiration pour Fabiu. Je vous les recommande les yeux fermés, elles sont fantastiques : le roman Le Guépard, de Giuseppe Tomasi di Lampedusa ; le film Mort à Venise de Luchino Visconti et enfin le film A Single Man de Tom Ford.
Pour voir Fabiu, rendez-vous aux séances de la compétition internationale I11.