Dernier verre avec Ce n’est rien
Entretien avec Marion Harlez Citti, réalisatrice de Ce n’est rien
Dans Ce n’est rien, à quel point vouliez-vous travailler sur la thématique de la rupture amoureuse ? Envisagez-vous de réaliser d’autres films sur cette question ?
Je voulais parler de l’emprise dans la relation amoureuse et de la difficulté à se séparer quand on est pris dans ce genre de relation. Dans mon prochain film la séparation est encore un des thèmes, il s’agit d’une femme qui quitte un homme pour aller dans une communauté misandre.
Qu’est-ce qui vous intéressait dans le personnage très fort qu’est Tony ?
Tony est un personnage égotique, son désir d’attention n’est jamais rassasié. Ce qui m’intéressait c’était de comprendre sa complexité, sans le juger et aussi de comprendre la complexité du lien entre lui et Alice. Tony est aussi insupportable qu’il est bouleversant. Il est doté d’une grande force créatrice autant que d’une terrible capacité de destruction. C’est un personnage qui provoque du dégoût et de la fascination.
Comment le fait de placer l’action au sein d’une résidence de création théâtrale a-t-il impacté votre processus créatif ?
Je voulais questionner la mise en scène de soi avec le personnage de Tony, la mise en scène de la séparation d’Alice et Tony, et la mise en scène comme proposition artistique avec les répétitions de théâtre. Placer l’action au sein d’une résidence de théâtre me permettait la mise en abîme. Ainsi je pouvais proposer de la théâtralité dans ma manière de mettre en scène mon histoire ; il y a beaucoup de plans larges, de tableaux d’ensemble. La lumière évolue de manière artificielle, et le dernier plan pourrait être un décor et un éclairage de théâtre. À la fin du film Alice éteint la lumière, c’est la fin du spectacle.
Comment avez-vous travaillé le rythme entre les moments drôles et ceux qui génèrent une sensation de malaise ?
Le mélange des tons était un défi important dans la construction du film à chaque étape de création. L’enjeu était de raconter comment le contrôle d’un seul individu peut impacter tout un groupe. Cette alternance de tons raconte pour moi les liens poreux entre les personnes et les situations. J’ai cherché cette dualité entre rire et malaise dans l’ambiance générale du film. Tony est sur un fil entre l’humour et la provocation, Alice est constamment prise dans ces filets mais les personnages secondaires altèrent le drame. Ils ont leurs propres trajectoires et préoccupations et cela aussi crée de la comédie. Le travail sur la cacophonie des dialogues et des actions, à vue et en off, m’a permis de rythmer et de préciser l’alternance des atmosphères à l’intérieur d’une même séquence.
Y a-t-il un court métrage qui vous a particulièrement marquée ?
Le film de Christophe Le Masne, Annie de Francia, est un court métrage que j’adore !
Selon vous, qu’est-ce qui fait un bon film ?
Je ne sais pas ce qui fait un bon film. Je connais très fort la sensation d’aimer un film ; c’est un sentiment de grâce. C’est mystérieux.
Pour voir Ce n’est rien, rendez-vous aux séances de la compétition nationale F2.