Breakfast avec Tjejtoan 4-ever (Toilettes filles 4-ever)
Entretien avec Angelika Abramovitch, réalisatrice de Tjejtoan 4-ever (Toilettes filles 4-ever)
Comment présenteriez-vous Tjejtoan 4-ever à quelqu’un qui n’aurait pas encore vu le film ?
Trois histoires se croisent au cours d’une même nuit dans les toilettes des femmes, bondées, d’une boîte de nuit bruyante. C’est un film qui parle de peines de cœur, de sororité, d’amitié et de trahison qui nous unissent et nous embarquent dans un voyage riche en émotions et haut en couleurs.
Votre film montre des aspects de la vie des femmes qu’on ne voit pas fréquemment à l’écran. Était-ce une décision consciente de votre part dès le début, ou est-ce que cela vous est venu en cours d’écriture ?
Nous avions envie de faire un film brut et honnête, et nous sommes parti·e·s de là pour faire ce film. Nous avions envie d’être courageuses et audacieuses, sans nous excuser de quoi que ce soit. Montrer les toilettes des femmes nous a paru enthousiasmant et interdit quelque part. Quand on est une femme, on sait tout de ce lieu sacré, mais si on n’a jamais mis les pieds dans les toilettes des femmes, en tant qu’homme ou autre, c’est une fenêtre secrète par laquelle entrevoir un monde si fou et adorable que vous ne voudrez plus jamais en sortir. Il était important pour nous de raconter l’histoire d’une manière qui puisse parler à de nombreuses femmes. Nous voulions la raconter en restant au plus proche de la réalité sans rien édulcorer. Mais visuellement, on a toujours eu envie que ce soit comme l’intérieur d’un gros paquet de bonbons, comme il se doit.
Vos films traitent de nombreux sujets importants, qui ont tous quelque chose de sombre. Comment parvenez-vous à trouver le juste équilibre entre divertissement et profondeur dans un même film ?
C’est très facile en réalité. Je trouve que ce sont deux choses qui coexistent de manière très rapprochée. Je pense que si on a l’intention de raconter une histoire sombre, il faut toujours s’efforcer d’en voir le potentiel lumineux aussi, afin de trouver le bon équilibre. On ne peut pas avoir l’un sans l’autre. Je choisis de croire qu’il y aura toujours une lumière au bout du tunnel, et j’imagine que ça transparaît dans ma manière de réaliser les films.
Y a-t-il un court métrage qui vous a particulièrement marquée ?
Wasp d’Andrea Arnold. Ce film est selon moi un exemple parfait du fait qu’on ne peut pas avoir les ténèbres sans lumière qui transparaisse. Je trouve que les meilleurs court métrages sont souvent les plus simples. (Quoique Tjejtoan 4-ever soit une exception.) J’adore The Big Shave de Martin Scorsese, si simple, tellement gore. La compilation des très étranges court métrages de David Lynch me reste toujours en tête. Je me souviens d’être passée par des émotions étranges après les avoir vus et ça m’a beaucoup plu.
Selon vous, qu’est-ce qui fait un bon film ?
Houlà. Ça, c’est une question difficile. De mon point de vue, si je suis emportée dans l’univers des films et ne les remets en question à aucun moment, là je pense que c’est signe qu’il s’agit d’un bon film. Je suis là, je marche complètement, et je me sens impliquée, et quand le film se termine, une toute petite partie de moi est transformée à jamais.