Goûter avec Bellus
Entretien avec Alexis Pazoumian, réalisateur de Bellus
Qu’aviez-vous envie d’explorer au travers la relation entre Michel et Santos ?
Bellus suit le cheminement intérieur et spirituel de Michel. Le film épouse le point de vue du jeune homme. Ce n’est pas le récit d’une conversion, mais d’un cheminement tortueux vers une forme de rédemption. La religion évangéliste a une place très importante au sein de la communauté gitane. Bon nombre d’anciens trafiquants trouvent une voie et un équilibre à travers la religion. Michel aspire à une vie meilleure et va osciller entre quête spirituelle, et la recherche de son “moi profond”. Sa relation à Santos m’a permis d’appuyer le cheminement mais aussi de montrer qu’à travers leur relation et leur vies parfois opposées, la solidarité est la force de cette communauté.
Votre expérience de photographe vous a-t-elle aidé pour vous faire accepter de cette communauté de gitans du sud de la France ?
En 2016, j’ai eu le désir de photographier le pèlerinage aux Saintes-Maries-de-la-Mer avec la volonté de sentir la force de la religiosité qui conduit ces prêcheurs venus des quatre coins de l’Europe et qui rassemble des populations gitanes, roms, tsiganes et manouches. J’y ai fait la connaissance de Tino, un boxeur gitan de la cité Bellus, près de Perpignan, qui s’est proposé de me faire découvrir ce lieu. Sans l’ombre d’une hésitation, j’ai accepté son invitation. Fasciné par l’identité singulière de cette communauté et touché par la chaleur de son accueil, j’ai rapidement ressenti le désir de renouveler l’expérience. Au cours de mes nombreux séjours, je me suis familiarisé avec la culture qui berce cette cité. J’ai trouvé dans la violence de leur histoire meurtrie et de leur quotidien déraciné un écho à mon histoire familiale. Comme souvent dans ces populations migrantes, on retrouve des femmes et des hommes qui se raccrochent à des traditions fortes, doublées d’un attachement à la religion. Cela a fait naître en moi l’envie de construire une histoire à partir de cette thématique, afin de dresser un portrait fidèle de cette communauté, loin des stéréotypes souvent associés aux Gitans. Mon expérience de photographe m’a permis de découvrir cette communauté mais pas de me faire accepter. Seul la persévérance et le temps m’ont permis de me faire accepter.
L’une des réussites du film réside dans la présence des acteurs à l’écran. Comment avez-vous collaboré avec eux ? Avez-vous une approche spontanée et informelle du scénario, ou au contraire très écrite ?
La part de documentaire dans ce récit est totalement assumé : les décors sont réels et font partie intégrante du quotidien de Michel et de sa communauté, afin de capter une atmosphère qui leur est propre. Les comédiens sont pour la plupart de la famille de Michel Pubill. J’ai souhaité impliquer les habitants de la cité Bellus pour qu’ils puissent interpréter leur propre rôle autant que possible comme la grand-mère Carmen par exemple qui est réellement la grand-mère de Michel. La matière du scénario a constitué une base à partir de laquelle ils se sont exprimés librement avec leurs propres expressions, leurs dialectes, afin de dresser un portrait fidèle de cette communauté. Il y avait une grande part de spontanéité même si les dialogues était très écrit pour les différentes commissions que nous avions présentées.
Quel est votre court métrage de référence ?
Je dirais plutôt un film de référence pour mon chef opérateur Hovig Hagopian et moi-même qui a été A Ciambra de Jonas Carpignano. Il a tourné un film dans une communauté rom du sud de l’italie avec des comédiens non professionnels en débutant par un court métrage avant de réaliser ce premier long métrage.
Que représente pour vous le festival de Clermont-Ferrand ?
Avec mes producteurs nous visions depuis le début le festival de Clermont-Ferrand qui représente pour nous un véritable tremplin pour la carrière de ce film et nous sommes extrêmement fiers d’être sélectionnés.
Pour voir Bellus, rendez-vous aux séances de la compétition nationale F9.