Dernier verre avec HIDE (CACHÉ)
Entretien avec Daniel Gray, réalisateur de HIDE (CACHÉ)
Pourquoi vous êtes-vous au départ intéressé au jeu de cache-cache ?
Ce n’est pas vraiment le jeu de cache-cache qui m’est venu d’abord. Je jonglais avec certaines idées liées au fait d’avoir quitté mon pays d’origine, et je voyais autour de moi tous ces immeubles et ces visages d’un type différent. J’ai pris un morceau d’une de ces histoires et je me suis concentré là-dessus, parce que je sentais que j’arrivais de cette façon à susciter les émotions que je voulais faire naître chez les spectateurs. C’est ce qui m’a amené au jeu de cache-cache.
Dans quelle mesure vous intéressez-vous aux relations parents-enfants et avez-vous d’autres projets sur ce thème ?
La relation parents-enfants était nécessaire, dans le film, parce que les sentiments que j’essaie d’évoquer se rattachent d’abord à mes parents et à moi, même si de façon plus large ils s’étendent à tout, y compris au chez-soi. Mon prochain court métrage englobe le thème du chez-soi, mais l’aborde davantage sous l’angle d’un environnement que les gens remplissent d’une façon particulière.
Le protagoniste qui se cache n’est-il pas en fait un guetteur, un voyeur ou un spectateur ?
Il ne surveille personne et n’est pas un voyeur. Je crois que le terme « spectateur » le décrit sans doute mieux. Au départ, il jette un coup d’œil à l’extérieur pour voir s’il est repéré, mais à mesure qu’évolue l’histoire, sa passivité et son incapacité de bouger deviennent plus apparentes. Lorsque le jeu commence, il est un participant qui appartient au monde extérieur à l’armoire. Un joueur, donc, mais qui se transforme au fil du récit jusqu’à se trouver pris au piège hors de la famille, même s’il ne quitte pas la pièce.
Dans vos intentions premières, le protagoniste qui cherche était-il un ami ou un frère de celui qui se cache, ou s’agissait-il plutôt d’une projection de ce dernier ? Avez-vous joué volontairement sur cette double lecture ?
Je prévoyais qu’il serait de l’ordre de la projection, un peu comme une ombre, peut-être. Mais il arrive en fait la même chose aux deux frères : ils partent. Les points de vue diffèrent toutefois et dans le cas présent, la perspective est celle du garçon qui se cache.
Vous arrive-t-il souvent de puiser votre inspiration dans les jeux lorsque vous songez à faire un film, et avez-vous d’autres projets qui reposent sur cette approche ?
J’aime beaucoup la théorie des jeux et quand j’envisage de faire un film, j’ai toujours derrière la tête l’impression que je joue avec le public un jeu qui consiste à l’amener à se frayer un chemin en douceur parmi les émotions avec lesquelles il se débat, coincé dans une salle de cinéma. Mais en fait, votre question avait peut-être pour but de savoir si j’allais faire d’autres films sur le thème des jeux d’enfants. Il se pourrait que cela se produise un jour : ils ont le don d’imiter la vie adulte avec leurs règles et leurs personnages (rires).
Quel est selon vous l’avenir du court métrage ?
Je crois que les courts métrages ont toujours un grand avenir, mais qu’il est difficile de les découvrir. Les gens ont tendance à vouloir trouver ce qu’ils connaissent. Mais l’intérêt des courts métrages, c’est qu’ils peuvent surprendre et qu’ils sont suffisamment brefs pour vous permettre de les tolérer jusqu’à la fin sans trop souffrir quand vous ne les aimez pas (rires). À mon sens, l’avenir du court métrage devrait s’appuyer sur l’organisation des contenus. Une personne compétente pourrait constituer un bloc de cinq ou six films dans lesquels il y aurait des surprises, des films qu’on ne chercherait pas, normalement. C’est ce qui se produit dans les festivals, mais quand on est chez soi devant l’immensité d’Internet, les choses se perdent et tout devient un peu vaseux. Alors oui : l’organisation des contenus.
Si nous devions revenir au confinement, quels plaisirs culturels recommanderiez-vous pour dissiper notre ennui ?
Hmm, j’ai été coincé en isolement durant deux semaines quand la première vague nous a frappés. J’ai passé du temps à composer des airs un peu ridicules et à essayer de tenir le plus longtemps possible en faisant la planche.
Pour voir HIDE (CACHÉ), rendez-vous aux séances de la compétition labo L2.